« Tu verras une cité royale, adossée à une colline alpestre, superbe par ses hommes et par ses murs, dont le seul aspect indique qu'elle est la maîtresse de la mer. »Itinéraires de Gênes à la Terre Sainte, Pétrarque
Capitale de la Ligurie, Gênes, logée au fond du golfe du même nom,
dessine ses contours au cœur d’une baie semi-circulaire, enserrée
de hautes collines en forme d’amphithéâtre. A la fois rudes et
protectrices, elles semblent fermer brutalement les Apenins, tandis
que, de l’autre côté, s’étend à l’horizon, comme une promesse
d’ailleurs, la mer ligurienne, bordée à l’est par la Riviera du
Levant, et à l’ouest par la Riviera du Ponant. Gênes, en effet, n’est pas entourée de vastes et plates étendues, ni de terres
fertiles, sur lesquelles elle aurait pu fonder sa richesse et sa
prospérité. Terre de marins, d’aventuriers, d’explorateurs, de
commerçants, d’amiraux, son principal débouché est la
Méditerranée, à partir de laquelle elle s’élancera dès
l’Antiquité vers l’Orient, mais aussi vers l’Espagne et les
côtes d’Afrique occidentale. « Verticale, maigre, osseuse »,
selon les termes de Cesare Ripa, Gênes, pour avoir pleinement
accompli par le passé sa vocation maritime, sut s’intégrer dans
une histoire beaucoup plus vaste que la seule histoire italienne. En
même temps, au fur et à mesure qu’elle étendait sur les flots
son empire, elle n’eut de cesse d’élargir son district en
Ligurie, sur la côte et dans l’arrière-pays. De ce passé
fascinant et en partie révolu, reste encore un patrimoine
architectural hors du commun, églises, villas et palais placés sous
la protection de l’UNESCO, mais aussi de prestigieux musées
aménagés au cours du XXe siècle.
Pour
autant, Gênes n’a pas à rougir du présent et demeure, non
seulement le premier port, mais aussi la cinquième ville la plus
importante d’Italie, à la fois en nombre d’habitants – 592 000 – et en termes de rayonnement économique. Fer de lance de l’industrie
navale, Gênes est aussi à la pointe de l’industrie métallurgique
et, surtout, par son activité portuaire, une place commerciale
majeure en Europe. Enfin, malgré, les restrictions budgétaires de
l’Etat italien, Gênes est parvenue à valoriser ces trente
dernières années son patrimoine architectural à l’occasion
d’événements phares et de célébrations historiques comme le
500e anniversaire de la découverte de l’Amérique en 1992 ou
encore « Gênes capitale européenne de la culture en 2004 ». Ces
manifestations initièrent aussi de vastes travaux de modernisation
et encouragèrent la construction d’édifices contemporains
emblématiques à leur tour du dynamisme culturel de la ville.
Des origines à l'âge de fer
Terre ancienne de peuplement, la Ligurie conserve de nombreux
vestiges de l’époque préhistorique, notamment dans la Riviera du
Ponant. Disséminées le long de la côte, de multiples grottes
abritèrent en effet depuis le Paléolithique hommes et animaux
sauvages. En l’espace d’un siècle et demi, archéologues et
spéléologues ont progressivement mis au jour les grottes de Balzi
Rossi, près de Vintimille, celles d’Arma di Tagia près de San
Remo, celles de Toirano, entre Albenga et Pietra Ligure, ou encore
celles d’Arene Candide, près de Savone. La trace la plus ancienne
d’occupation humaine fut ainsi découverte à Balzi Rossi avec le
squelette d’une femme de type Homo erectus remontant à 240 000 ans
avant J.-C., mais le site vit aussi se succéder l’homme de
Neandertal et l’Homo sapiens.
A partir de l’âge du bronze, les habitants de la région
s’implantèrent aussi près du mont Bégo, dans la vallée des
Merveilles, aujourd’hui en territoire français, célèbre pour ses
gravures rupestres. A la même époque, sur la côte occidentale de
l’actuelle Ligurie, se développaient les castellari : des
habitations rudimentaires, mais rassemblées en villages et dotées de
fortifications sommaires en pierre sèche afin de se protéger des
tentatives d’invasion de peuples venus de la mer. Le site originel
de Gênes sera ainsi installé dans les hauteurs avec un ensemble
défensif similaire dont les premiers vestiges datent en revanche du
début de l’âge de fer, vers le VIIIe siècle avant J.-C. Les
Ligures sont alors en contact étroits avec les Etrusques et les
Grecs de Phocée, dont on a d’ailleurs retrouvé de nombreuses
traces à Gênes, dans l’anse de Mandraccio, centre déjà
important d’activité commerciale et maritime. La période
préromaine est aussi marquée comme dans toute l’Italie du Nord
par l’invasion celtique du IVe siècle.
-240 000 : Présence attestée de l’Homo erectus en Ligurie à
travers un squelette de femme découvert dans les grottes de Balzi
Rossi, l’un des sites préhistoriques les plus célèbres d’Europe
méditerranéenne, qui doit son nom à la couleur rouge de la roche
calcaire.
De -80 000 à -60 000 : Présence attestée en Ligurie de l’homme
de Neandertal, notamment sur le site de Balzi Rossi. Il disparaîtra
ensuite progressivement pour être remplacé par l’Homo sapiens.
De -36 000 à -10 000 : Période correspondant à l'installation en
Europe de l’Homo sapiens sapiens, caractérisée par une faible
densité de population vivant exclusivement de la chasse, se
nourrissant de viande de bouquetins, de cerfs, de sangliers, de
chevreuils, mais aussi d’élans et de bisons européens. Le culte
des morts se développe en même temps que les premières
réalisations artistiques, dont témoignent en Ligurie de
remarquables vestiges, ainsi dans les grottes de Balzi Rossi avec, vers -25 000, des statuettes de Vénus sculptées dans la pierre, ou
encore, vers -20 000, la gravure rupestre du cheval de Przewalski,
espèce sauvage n’existant plus aujourd’hui qu’en Mongolie.
Cette gravure est contemporaine de la triple sépulture découverte
sur le même site dans la grotte dite « Barma Grande » et abritant
ensemble un homme d’environ deux mètres et deux adolescents. La
tombe dite « du jeune prince », découverte à Arène Candide, date de la
même époque. Le squelette était orné de coquillages, de dents de
cerfs et de queues d’écureuil. Les grottes de Toirano recèlent
aussi de véritables trésors avec, notamment, vers -12 000, la
présence dans la salle dite « des Sorcières » d’empreintes de pieds,
de mains et de genoux.
De -9000 à -6000 : Période du Mésolithique avec des populations
de chasseurs-cueilleurs dans les zones montagneuses et le
développement dans les plaines d’une première agriculture encore
très rudimentaire.
De -6000 à -5800 : Les procédés agricoles caractéristiques du
Néolithique se diffusent dans toute l’Italie trois mille ans après leur
apparition en Anatolie. En Ligurie, la période voit ainsi la
généralisation de l’élevage des brebis, l’introduction de
l’orge et de trois variétés de blé.
A partir de -3600 : C’est le début de l’âge du cuivre, rendu
possible par l'amélioration de la maîtrise du feu. Les pratiques
funéraires, sans doute liées au culte des ancêtres, semblent de
plus en plus élaborées. Les paysages se transforment
considérablement : les forêts des côtes laissent progressivement la place au maquis et à de vastes prairies.
A partir de -2000 : Avec l’avènement de l’âge du bronze
ancien, apparition en Lunigiane de premières statues-stèles en
grès, figurant des femmes, symboles de fertilité, ou des hommes
armés, évoquant la guerre et le culte des héros. De telles
sculptures anthropomorphes, associées sans doute à des rites
religieux précis, mais demeurés inconnus, seront ainsi réalisées
jusqu’à -500 dans la région. Nombre d’entre elles sont
visibles au musée du château de La Spezia, abritant la collection
archéologique Ubaldo Formentini.
De -1600 à -1000 : Période du Bronze moyen et récent qui voit de
nouvelles transformations du paysages avec le terrassement des
versants, si caractéristiques encore aujourd’hui de la région
ligure. L’habitat évolue considérablement avec la généralisation
de pratiques artisanales collectives, comme la filature et le tissage
et l’apparition des castellari, constructions en pierre sèche
dotées d’éléments fortifiés et servant à protéger les
habitants et leurs réserves de nourriture. Les villages se
multiplient, mais conservent chacun une faible densité de population.
A partir de -800 : Début de l’âge du fer. Les différentes
tribus ligures sont disséminées sur un territoire accidenté,
lui-même partagé entre les zones montagneuses séparées par
d’étroites vallées, les zones marécageuses, et les sites côtiers
de plus en plus nombreux, dont celui de la future Gênes. Si ces
tribus s’opposent toutes régulièrement entre elles, on discerne
deux grandes zones d’influence auxquelles les rattacher sur le plan
géographique et culturel : les Ligures occidentaux proches du Sud de
la France et de la Suisse ; les Ligures orientaux tournés d’un côté
vers la plaine du Pô et de l’autre vers la mer Tyrrhénienne. Les
premiers contacts avec les Grecs de Phocée et les Phéniciens sont
établis, et Hésiode évoque alors parmi les plus anciens peuples « les Ethiopiens, les Ligures et les Scythes éleveurs de chevaux ».
Vers -700 : La présence de la tribu ligure des Tigulli est attestée
à Chiavari, sur la Riviera du Levant, par les vestiges d’une
nécropole, aujourd’hui visible au musée archéologique de la
ville. Le village fortifié, récemment découvert sur les hauteurs de
Gênes, à Castello, date de la même époque.
-600 : Les Grecs de Phocée fondent à cette date Massilia, mais ne
semblent avoir établi aucune base maritime propre en Ligurie. Pour
autant, le site de Gênes se développe et se dote d’une nouvelle
enceinte en pierre, surplombant l’anse de Mandraccio, où les
fouilles archéologiques ont confirmé des liens commerciaux étroits
avec les Grecs et les Etrusques.
A
partir de -400 : Les Celtes se fixent en Ligurie dont ils partagent
désormais le territoire avec les populations autochtones. Une partie
d’entre elles demeure ainsi concentrée autour de Gênes.
De la domination romaine aux invasions barbares (IIIe siècle avant J.-C. – VIIe siècle après J.-C.)
Les Romains étendent leur domination sur l’Italie du Nord à la
fin du IIIe siècle avant J.-C. Dès le début de la guerre
romano-ligure en -238, Gênes se range définitivement à leurs
côtés, mais la grande majorité de la Ligurie demeure longtemps
rétive à l’envahisseur. Elle oppose ainsi durant plusieurs
décennies une résistance sans relâche, menée entre autres par les
tribus des Intemelli et des Ingauni. Celles-ci s’allient avec les
Carthaginois et, sous le commandement d’Hannibal et de ses frères, mettent à sac Gênes en 205 avant J.-C. Les Romains cependant
finiront par l’emporter et poursuivront leur expansion en
repoussant Ligures et Celtes installés dans la région. Unis contre
Rome, ces derniers forment en -200 une coalition défaite à son
tour en -197 avec le soutien de Gênes. Quelques décennies plus
tard, la Ligurie est définitivement pacifiée, mais au prix d’une
répression cruelle et systématique : les tribus ennemies sont
massacrées, déportées, ou encore réduites en esclavage. Dès
lors, les Romains installent sur la côte de nombreuses petites cités
portuaires à l’exemple de Luni, fondée en -177. Gênes, dont le
nom, d’origine latine, est attestée pour la première fois en -148, constitue aussi une base maritime importante et le point de
départ de la via Postumia conduisant jusqu’à Milan. Le réseau
routier sera complété au Ier siècle avant J.-C. par la via Julia
Augusta reliant le Var à l’Emilie-Romagne en longeant le littoral.
Devenue colonie romaine au début du Ier siècle avant Jésus-Christ,
Gênes accède au statut de municipe en 42 avant J.-C., puis à la
citoyenneté romaine au siècle suivant. A partir d’Auguste, la
Ligurie est désignée comme la IXe région de l’empire. Plus
vaste qu’aujourd’hui, elle s’étend à l’ouest jusqu’au Var
et aux Alpes, et à l’est jusqu’au fleuve du Pô et aux Appenins.
Elle demeure toutefois secondaire aux yeux des Romains, tant sur le
plan économique que politique, et plusieurs auteurs latins, comme
Caton et Virgile, alimentent un certain mépris pour ses habitants,
décrits comme des rustres et des menteurs. Pline l’Ancien rend
cependant hommage à leurs vins généreux et réputés, et Diodore de
Sicile comme Tite-Live vantent leur bravoure au combat ou encore leur
connaissance de la navigation. La longue période de la Pax romana
garantit à la Ligurie, désormais totalement assimilée à l’empire,
une relative prospérité agricole malgré une terre souvent ingrate
et un relief très accidenté. Quelques décennies après la
promulgation en 313 de l’édit de Milan, le christianisme se
généralise en Ligurie, dont Gênes devient le premier évêché
confié alors au futur San Siro qui donnera son nom au VIe siècle à
l’une des basiliques les plus importantes de la ville.
-238 : début de la guerre romano-ligure relatée par Tite-Live.
De -218 à -204 : Romains et Carthaginois se disputent Gênes au
cours de la deuxième guerre punique. Les Romains établissent leur
première base en Ligurie.
-205 : Sous le commandement d’Hannibal et de ses frères Hasdrubal
et Magon, les Carthaginois, alliés aux tribus des Intemelli et des
Ingauni, font le siège de Gênes et parviennent à la détruire.
-204 : Le proconsul Marcus Livius Salinator et le propréteur
Spurius Lucretus sont envoyés contre Magon. Ils font reconstruire
l’oppidum de Gênes.
Vers -200 : d’après l’historien Diodore de Sicile, Gênes est déjà à cette date emporion,
c’est-à-dire un port de commerce, dont les habitants connaissent
les routes maritimes menant non seulement vers l’Occident, mais
aussi le long des côtes africaines.
-197 : Sous le commandement de Quintus Minucius Rufus, Gênes sert
de base aux Romains contre la coalition de Ligures et de Celtes
formée en -200 contre Rome.
-180 : Déportation en masse de la tribu des Apuani.
-177 : Non loin de La Spezia, les Romains fondent la ville de Luni,
constituant d’abord une base stratégique à partir de laquelle ils
repoussent les Ligures. Mais l’exploitation du marbre de Luni,
vendu par la suite dans tout l’empire, en fait rapidement un
important port de commerce. De nombreux et remarquables vestiges
témoignent de ce rayonnement d’antan (temples, villas,
amphithéâtre, peintures à fresque et sculptures) et font de Luni
le plus grand site archéologique d’Italie du Nord.
-175 : Déportation en masse de la tribu des Friniati.
-173 : Réduction en esclavage de la tribu des Statielli.
-148 : Construction de la via Postumia reliant Gênes à Milan et
Crémone. Sur l’une des bornes militaires de cette voie romaine est
attesté pour la première fois le toponyme Genua.
-117 : Inscription sur une table en bronze non seulement du
toponyme Genua mais aussi du nom de ses habitants, les Genuates.
-89 : Alors que les Romains réorganisent la Gaule cisalpine,
plusieurs cités de Ligurie, dont Gênes, deviennent
administrativement des colonies latines. Leurs habitants, sans être
reconnus citoyens romains, voient leurs droits élargis, mais sont
aussi soumis à de nouvelles obligations, notamment militaires.
-49 : César concède le droit de bourgeoisie, statut proche de la
citoyenneté, à
toutes les cités de la Gaule cisalpine et transpadane.
-14 : Début du « siècle d’Auguste ». La Ligurie devient la
IXe région de l’empire et bénéficie pour trois siècles de
l’instauration de la Pax romana.
13 après J.-C. : Construction de la via Julia Augusta reliant le Var à
l’Emilie-Romagne.
De 98 à 117 : Règne de Trajan, sous lequel Gênes reçoit le statut
de municipe, qui confère à ses habitants le droit de citoyenneté
romaine.
313 : Edit de Milan prononcé par Constantin et autorisant le culte
chrétien dans tout l’empire.
324 : Siro, premier évêque de Gênes, participe à un synode
romain. Vénéré par la suite à Gênes comme un saint fondateur et
martyr, il aurait aussi, selon la légende, libéré la ville d’un
basilic – serpent monstrueux au souffle empoisonné – en le
sommant de se jeter dans la mer.
395 : Partage de l’Empire romain.
476 : Après la chute de l’Empire romain d’Occident, la Ligurie
subit plusieurs incursions barbares, notamment celles des Ostrogoths
et des Vandales.
De 536 à 554 : L’empereur Justinien affronte les Ostrogoths qui
dévastent Milan en 539. Les troupes de Byzance se retirent vers le
Pô et contrôlent le nœud routier où se rejoignent la via Postumia
et la via Julia Augusta. A partir de 553, une grande partie du
territoire ligure, avec Gênes en son centre, entre ainsi pour un
siècle dans l’orbite de Byzance. La Ligurie devient la Provincia
Maritima Italorum.
568 : Les Lombards envahissent à leur tour l’Italie et c’est à
Gênes que se réfugie alors l’évêque de Milan. Il y fait édifier
l’église Saint-Ambroise au pied de l’ancienne muraille romaine.
A la fin du VIe siècle : Gênes devient un centre urbain et
administratif plus important, et est désignée par Grégoire le Grand comme urbs et civitas. Celui-ci évoque aussi la
basilique San Siro, abritant les reliques du premier évêque de la
ville. A la même époque, de nombreuses autres églises voient le
jour à l’exemple de Saint-Vittore-et-Sainte-Sabine,
Saint-Pancrazio ou Saint-Nazaire, dont on conserve dans la crypte de
l’édifice actuel, un chapiteau orné de feuilles d’acanthe.
Vers 643 : Les
Lombards du roi Rothari conquièrent la Ligurie et détruisent Gênes.
652
: Retour à Milan de l’évêque exilé.
658
: Gênes commence à renaître de ses cendres. Le roi lombard Aripert
y fait édifier entre autres l’église Santa-Maria-di-Castello.
671
: Les Lombards abandonnent définitivement l’arianisme et se
convertissent au catholicisme.
Au
VIIIe siècle : Rédaction de la chronique dite « du pseudo-Frégédaire »,
relatant la destruction de Gênes par le roi Rothari en 643.
De la période carolingienne à l'affirmation progressive de l'autonomie génoise (VIIIe – XIe siècle)
La
période carolingienne est assez peu documentée à Gênes. Si
Charlemagne intervient en Italie en 774 et s’empare du Royaume
lombard, il n’atteint pas alors les côtes de l’actuelle Ligurie.
La présence d’un premier comte carolingien, Adhémar, n’est
attestée dans la cité génoise qu’en 806. Celui-ci trouve la mort
en Corse en combattant les Sarrazins et inaugure ainsi plusieurs
décennies de guerres et de résistance contre leurs raids et
pillages incessants. En 935 cependant, les assaillants musulmans
parviennent à s’emparer de Gênes et la détruisent totalement
après s’être emparé de toutes ses richesses et avoir réduit en
esclavage une partie de ses habitants. Ex
nihilo
ou sur les ruines des premiers édifices paléochrétiens, sont par la
suite reconstruites à Gênes de nouvelles églises, tandis que la
lutte contre les Sarrazins s’intensifie dans la région sous la
conduite d’Hugues d’Arles, roi d’Italie, allié à la flotte
byzantine. Les territoires au sud du Pô, puis ceux au nord-ouest
sont alors réorganisés et confiés au gouvernement de marquis. Gênes
est ainsi intégrée à la marche de Ligurie orientale, dite aussi « Obertenga ». Déjà forte de sa spécificité maritime, elle obtient
peu à peu cependant d’importants droits civiques, l’affranchissant
en partie de l’autorité seigneuriale. Divisée en plusieurs
quartiers dont trois principaux, la ville, couverte de majestueux
édifices, témoigne alors d’un véritable rayonnement
architectural et spirituel.
773
: Le Royaume lombard est annexé par Charlemagne, mais ce dernier
n’étend pas alors ses conquêtes jusqu’aux côtes ligures.
802
: Le marchand juif Isaac, ambassadeur de Charlemagne auprès du
calife de Bagdad Harun al-Rashid, organise le transport vers l’Europe
de l’éléphant blanc Abul Abbas, offert en cadeau à l’empereur
des Francs. D’après les sources, il fait alors venir de Ligurie,
sans doute de Gênes, une flotte spécialement armée à cet effet.
806
: Un
premier comte carolingien est attesté à Gênes où il reçoit le
titre de praefectus
civitatis Genuensis.
Il meurt en Corse en combattant les Sarrasins. A la même époque,
les anciens remparts romains détruits par les Lombards sont
reconstruits.
850 : Rédaction de La Vie de saint Siro, l’un des rares
documents littéraires et religieux dont disposent les historiens
pour cette période.
877 : Passage du pape Jean VIII à Gênes, alors en route pour la
France afin d’y convoquer un concile. La même année, l’évêque
Sabbatino aurait rapporté à Gênes les reliques de saint Romulus,
lui-même ancien et prestigieux évêque de la ville, au Ve siècle.
Dans l’esprit du temps, la translation de telles reliques contribue
au prestige de la cité et permet d’affirmer son identité propre.
Selon certaines versions, l’église San Lorenzo aurait déjà reçu
à cette occasion le statut de cathédrale à la place de la
basilique San Siro, mais ce transfert n’est véritablement attesté
qu’à la fin du Xe siècle.
Entre 890 et 901 : Les Sarrazins lancent leurs premiers raids vers
Gênes, le plus souvent depuis les côtes françaises.
21 juin 934 : Depuis le golfe de Gabès en Tunisie, départ de
l’expédition du général Ya’qub ibn Ishaq al-Tamini, envoyé
combattre les Chrétiens par le calife fatimide al-Qa’im. Arrivée
à destination, la flotte ainsi constituée attaque d’abord les
côtes ibériques puis Gênes contre laquelle elle livre plusieurs
combats.
28 août 935 : Victoire des Sarrazins qui mettent Gênes à feu et à
sang, non sans emporter « 1 000 femmes et 8 000 prisonniers » d’après
les chroniqueurs musulmans. Côté occidental, ce tragique épisode
sera aussi relaté, plusieurs dizaines d’années plus tard, dans la
chronique de Liutprand de Crémone. L’existence d’une industrie
de la toile de lin et de la soie est alors mentionnée à Gênes.
940-941 : De concert avec la flotte byzantine, Hugues d’Arles, roi
Italie, mène une attaque contre les Sarrasins installés à
Fraxinetum, leur base provençale située près de l’actuel
Saint-Tropez. Mais il faudra attendre une quarantaine d’années avant d’éradiquer totalement cette menace venue du Sud de la
France. Entre-temps, Hugues d’Arles réorganise les territoires
situés au sud du Pô et en confie le gouvernement à des marquis,
investis notamment d’importants pouvoirs militaires.
945 : Teodolfo, évêque de Gênes, donne un nouvel élan à la cité,
en s’appuyant sur les bénédictins. Les lieux de culte
paléochrétiens, en grande partie détruits par le raid sarrazin de
935, sont transformés et agrandis. A la même époque, on construit
l’église Santa-Maria-di-Castello, encore visible aujourd’hui et
flanquée de la fameuse tour degli Embriaci.
950 : Bérenger II est proclamé roi d’Italie et poursuit
rapidement la réorganisation initiée par Hugues d’Arles. Ainsi, à
l’ouest du royaume, les territoires situés entre le Pô et la mer
sont divisés en trois nouvelles « marches ». Jusqu’au milieu du
XIe siècle, Gênes est intégrée à celle de la Ligurie orientale,
dite aussi « Obertenga », car sous l’autorité de la famille Obertenghi.
Pour autant, ses membres ne s’établiront jamais à Gênes,
préférant déléguer leur pouvoir administratif et judiciaire à
des vicomtes, censés les représenter. Ils finiront par se
substituer totalement à eux jusqu’à s’affranchir de leur
autorité. La Ligurie occidentale fait partie, quant à elle, de la
Marche dite « Aleramica ». Plus au nord, les territoires comprenant Turin
sont associés à la marche Arduinica.
958 : Bérenger II et son fils Adalbert confirment aux Génois un
certain nombre de droits civiques, auxquels ne peuvent contrevenir
les seigneurs locaux. Ces droits, notamment celui d’administrer
leurs propres biens à l’intérieur comme à l’extérieur de la
cité, sont consignés dans des diplômes, documents fondateurs de
l’histoire politique génoise. Il y est question aussi de la beauté
architecturale de la ville de Gênes, dans et hors les murs. Les
trois quartiers de la cité – castrum, civitas et burgus – s’ordonnent d’ailleurs respectivement autour de Santa Maria di
Castello, San Lorenzo et San Siro, autant d’églises prestigieuses.
965 : Début de la construction hors les murs de l’église Santo
Stefano, qui sera presque totalement modifiée au XIIe siècle.
984 : Construction, à la demande d’Adélaïde de Bourgogne, veuve
d’Otton Ier, de l’abbaye de San Fruttuoso di Capodimonte, non
loin de Portofino, dans la Riviera du Levant. Elle deviendra au cours
du XIe siècle la propriété des bénédictins.
987
: A cette date, San Lorenzo semble attestée comme cathédrale de
Gênes, à la place de San Siro, qui, située en dehors des murs,
semble plus exposée aux incursions pirates et aux éventuels
pillages. Cette dernière devient alors une église conventuelle.
L'instauration de la Commune des consuls et la conquête des mers (de l'an mil à 1153)
A partir de l’an mil, quatre cités maritimes affirment dans la
péninsule italienne leur suprématie commerciale, développent leur
arsenal de guerre et s’ouvrent vers l’Orient où elles
rivalisent entre elles : Gênes, Venise, Pise et Amalfi. A l’image
des autres cités du Nord de l’Italie, toutes contestent peu à peu
l’ancien système féodal à travers les revendications des
marchands et représentants de la petite noblesse, et s’organisent
en communes libres dès la fin du XIe siècle. Gênes se démarque
cependant dans le premier tiers du XIIe siècle en faisant élire son
collège de consuls tous les trois ans, puis chaque année.
Par ailleurs, plusieurs grandes familles s’y distinguent, asseyant
leur pouvoir et leur fortune, à titre plutôt personnel que
politique et collectif. A cette époque, la conquête des mers comme
l’aventure de la première croisade n’engagent pas encore
véritablement publiquement la cité de Gênes, mais restent avant
tout le fruit d’initiatives privées. L’on reprochera d’ailleurs
longtemps à Gênes l’individualisme de ses habitants, par
opposition à Pise, sa plus grande rivale, dont les habitants
semblent alors partager, sous l’égide de l’Etat communal, une
véritable communauté de destin. Cependant, si les deux cités
s’affrontent sur le plan commercial, et briguent pareillement la
Corse et la Sardaigne, elles sont aussi à même de s’unir contre
les musulmans qu’elles parviennent ensemble à chasser de la mer
Tyrrhénienne en 1015 et 1016. En même temps, Gênes conforte sa
position en Méditerranée orientale et, tout en s’opposant de
manière récurrente à Venise, y multiplie ses comptoirs commerciaux.
En 1110, elle est implantée aussi bien à Jaffa, Acre, Tyr,
Beyrouth, Tripoli ou encore Antioche. En Ligurie même, elle élargit
son territoire et étend peu à peu son hégémonie dans la Riviera
du Levant, restée jusque-là sous contrôle féodal. En 1113, elle
rachète ainsi au seigneur local la place forte de Portovenere,
position stratégique pour contrer l’expansion pisane en Italie du
Nord, et fonde par la suite six villes nouvelles dans les terres et
le long de la côte.
En ses murs, Gênes voit son dessin architectural se transformer avec
l’avènement de l’art roman et une nouvelle distribution des
quartiers, associé chacun à l’une des familles dominantes. Mais, sur le plan pictural, c’est à Sarzana, non loin de La Spezia
qu’est réalisée alors en Ligurie l’œuvre la plus novatrice,
une Crucifixion attribuée au peintre toscan Maestro
Guglielmo, et qui inspirera pendant près de deux siècles, de
nombreux artistes jusqu’à Pérouse et Florence. Par ses écrits
enfin, le chroniqueur Caffaro di Rustico magnifie sa ville et son
passé, instaurant ainsi la tradition littéraire de Gênes, véritable « boulevard de la Chrétienté » au cœur de la Méditerranée.
Vers l’an mil : Gênes compte, d’après les plans de Grossi
Bianchi et Poleggi, quatre portes, avec, à l’ouest, celle de San
Pietro, à l’est celle de Serravale, sur les hauteurs la porte dite « supérieure », et à proximité de la mer celle dite « du château ».
1007 : Construction par les bénédictins d’une autre église San
Siro située, elle aussi, en dehors des murs, mais plus modeste en
taille que l’ancienne cathédrale. Elle sera, au siècle suivant, redessinée en style roman. Appartenant aujourd’hui à l’un des
quartiers de Gênes, elle s’y réfère par son nom : San Siro di
Struppa.
1015-1016 : A l’instigation du pape Benoît VIII, reconquête de la
mer Tyrrhénienne par les Génois et les Pisans, placés sous le
commandement du marquis Adalberto. Celui-ci parvient en effet à
vaincre l’émir al-Mudjâhid réfugié près des côtes de
Sardaigne, après avoir dévasté la ville de Luni. Cette éclatante
victoire incitera peu à peu Gènes à se soustraire au gouvernement
de marquis pour s’affirmer comme Etat indépendant.
1023 : Les reliques de San Siro sont transférées dans la cathédrale
San Lorenzo.
Vers 1056 : Le marquis Alberto d’Opizzo, descendant des Obertenghi,
accorde une nouvelle reconnaissance de droits aux classes émergentes
de Gênes. A la même époque, la papauté, préoccupée par
l’application de la réforme grégorienne, confie à Pise
l’administration des évêchés corses, générant ainsi pour près
de deux siècles un conflit avec Gênes, qui revendique les mêmes
droits sur l’île.
1059 : L’évêque de Gênes Oberto, proche du pape, participe au
concile de Latran, mais lorsque la querelle des investitures se
radicalise, une partie de la population génoise se range du côté
du Saint Empire romain germanique. La ville connaît alors de
violents affrontements.
1060 : Un marchand juif mentionne dans ses lettres l’arrivée à
Alexandrie « de navires venus de Gênes et d’ailleurs ».
Vers 1065 : Avant même la première croisade, les Génois auraient
embarqué à Jaffa des pèlerins venus d’Europe du Nord – notamment
des Anglais et des Flamands – pour les ramener en Occident.
Vers 1080 : Naissance de Caffaro de
Caschifellone, premier rédacteur des annales officielles de la
ville.
Vers 1085 : Les marchands pisans semblent déjà solidement implantés
dans le Nord de la Sardaigne. Ils seront concurrencés dès le début
du XIIe siècle par des représentants de l’illustre famille
génoise des Doria.
1086-1087 : Avec le soutien du pape Victor III, Gênes, Pise, Amalfi,
Salerne et Gaète s’unissent contre le souverain ziride Tamim, à
l’origine de pillages répétés dans le Nord du Bassin
méditerranéen. Ils s’emparent ainsi, à l’été 1087, de Mahdia,
en Tunisie.
1092 : A nouveau, Pise et Gênes, toujours rivales sur le plan
commercial, combattent ensemble aux côtés du comte Raymond-Bérenger
II de Barcelone afin de reprendre la ville de Tortosa aux Sarrasins.
Mais l’expédition se solde cette fois par un échec.
Juillet 1096 : Le pape Urbain II, qui a lancé l’appel de Clermont
l’année précédente, envoie deux légats à Gênes afin de
solliciter la participation de la cité à la première croisade. Or, les habitants semblent divisés sur cette question car, en dépit des
conflits avec les musulmans, de nombreux marchands génois ont établi
avec eux un commerce fructueux. Les partisans de la réforme
grégorienne répondent cependant positivement à l’appel d’Urbain
II.
Juin 1097 : Une flotte de douze galères quitte finalement le port de
Gênes pour participer à la croisade, mais elle est armée à partir
de fonds privés.
Novembre 1097 : les Génois atteignent le port de Saint-Siméon près
d’Antioche, où ils envoient 600 hommes en renfort de l’armée
franque de Bohémond de Tarente qui fait le siège de la cité.
Vers 1097 : Début à Gênes de la Commune des consuls. Nommés
ensemble à la tête de la cité parmi des membres de l’aristocratie
et de la riche bourgeoisie, ils exercent le pouvoir judiciaire et
exécutif et commandent la milice pour une durée de trois ou quatre
années. Chaque gouvernement ainsi constitué est alors nommé
compagna.
3 juin 1098 : Antioche est prise par Bohémond de Tarente. En
récompense de leur soutien militaire, les Génois se voient
attribuer un quartier entier de la ville.
1099 : Le Génois Guglielmo Embracio, surnommé « Testadimaglio », prend
la tête d’une seconde expédition vers la Terre Sainte. Arrivé à
Jérusalem, il détruit, selon Caffaro, plusieurs galères pour
fournir aux croisés déjà sur place le bois nécessaire à la
construction de tours de combat. Celles-ci sont utilisées à la fin
du siège le 15 et 16 juin. Le 12 août, Godefroy de Bouillon assiège
Ascalon et s’en rend maître. Les Génois participent aussi à
cette victoire décisive. Lors de leur retour, ils rapportent
d’Orient le plat sur lequel aurait été déposée par Salomé la
tête de saint Jean-Baptiste. Cette relique se trouve depuis dans la
cathédrale de San Lorenzo. Or, celle-ci fut reconstruite à la même
époque en style roman. En témoignent encore aujourd’hui le
narthex, les portails latéraux, et, à l’intérieur, les colonnes de
la nef, mais le reste de l’édifice fut ensuite achevé en style
gothique.
Juillet 1100 : Une nouvelle compagna se met en place avec six
consuls. Au même moment, l’évêque Airaldo exhorte le peuple
génois à prendre les armes contre les musulmans.
1er août 1100 : Départ d’une troisième expédition en Terre
Sainte, cette fois véritablement officielle : la compagna se
charge en effet d’armer vingt-six galères et quatre ou six navires de
transport, dont elle confiera par la suite le commandement à
Guglielmo Testadimaglio. A son bord prennent place le légat du pape
Pascal II, le cardinal Maurizio, évêque de Porto, et le chroniqueur
Caffaro lui-même. D’après lui, les prélats en question auraient,
avec l’aide des Génois, convaincu Baudouin d’Edesse d’accepter
la couronne de Jérusalem, après la mort de Godefroy de Bouillon. A
son retour, Caffaro entreprendra en effet la rédaction en latin des
Annales, une histoire de la ville, commençant avec le début
des croisades et l’avènement de la Commune.
1104 : Les Génois participent à la prise de Gibelet le 28 avril – donnée ensuite à la famille génoise des Embracio – et à celle
d’Acre le 26 mai.
1109 : Les Génois participent à la prise de Tripoli de Syrie
(aujourd’hui Tripoli du Liban).
1110 : Les Génois participent à la prise de Beyrouth. Dans chacun des ports ainsi conquis, un quartier leur est spécialement réservé,
comme à Antioche.
1113 : En conflit avec les comtes de Lavagna, les Génois s’emparent
par la force de leurs châteaux dans la Riviera du Levant.
Au sud-est de la Ligurie, ils achètent en revanche le
château et le vieux bourg de Portovenere aux seigneurs de Vezzano.
1122 : Caffaro devient consul pour la première fois, au moment où
cette charge devient annuelle.
1130 : Les Génois lancent une expédition dans la zone de
Vintimille afin de contrôler la Provence. Ils s’affirment aussi
dans la région de l’Oltregiogo. Au nord de Gênes, elle couvre une
partie des Apennins. Dans la cité même de Gênes, se développe
autour du port naturel le quartier de la Ripa, qui devient le
cœur économique et social de la cité. Par ailleurs, à partir de
1130, les anciens consuls conservent leur pouvoir exécutif, mais
cèdent leur pouvoir judiciaire à de nouveaux consuls dits « de
justice ».
1132 : La rivalité entre Génois et Pisans, déjà exacerbée par
leur volonté mutuelle d’hégémonie sur la Corse, se poursuit le
long des côtes du Bas-Languedoc et de la Catalogne. Dans ce
contexte, Gênes installe une position stratégique à Narbonne et
occupe véritablement une place dominante dans l’espace
méditerranéen occidental.
1133 : Gênes devient le siège d’un archevêché, sous le
pontificat d’Innocent III, et obtient à son tour le privilège
d’administrer, en partage avec Pise, les diocèses corses. La même
année, elle se dote de son premier sceau communal, avec gravés, d’un
côté la porte, symbole de la ville, et de l’autre San Siro.
1138 : Dans la Riviera du Levant, Gênes impose aux seigneurs de
Lagneto, de Nascio et de Cogorno de prêter serment à la compagna et
les contraint à résider désormais dans les murs mêmes de la cité.
Au même moment, celle-ci obtient du Saint Empire romain germanique
le droit de battre monnaie à perpétuité. La même année enfin,
l’artiste toscan Maestro Guglielmo réalise en Ligurie la croix
dite « de Sarzana », sur laquelle est représentée la Crucifixion, œuvre majeure, première en son genre, et dont s’inspireront de
nombreux artiste d’Italie du Nord, notamment en Toscane et en
Ombrie.
1139 : Au sud-est de la Riviera du Levant, les Génois bâtissent un
nouveau bourg à Portovenere.
1140 : Gênes s’empare de Vintimille, mais accorde à ses habitants
de nombreux droits et privilèges. Le port de Gênes de plus en plus
actif et florissant accueille de nombreux marchands et banquiers
étrangers.
1142 : Ultime épisode de la guerre avec les seigneurs de Lavagna,
finalement contraints eux aussi de jurer la compagna et de venir
habiter à Gênes.
1145 : Les Génois, mais aussi les Pisans, participent à la croisade
contre les Sarrasins de Tortosa aux côtés d’Alphonse VII de
Léon-Castille et de Raymond-Bérenger IV d’Aragon, du seigneur de
Montpellier Guillaume VI, du roi de Navarre Garcia Ramirez.
1146 : Cette fois, les Génois décident d’attaquer Minorque, la
plus proche des bases sarrasines dans les Baléares. Leur succès est
éclatant.
1147 : Bernard de Clairvaux prêche la seconde croisade, mais les
Génois n’y prennent pas part, car ses objectifs sont trop éloignés
des escales côtières qui, seules, les intéressent. Ils lancent en
revanche de nouvelles expéditions en Espagne et participent
notamment à la prise d'Almeria le 16 octobre.
30 décembre 1148 : Tortosa tombe définitivement, Gênes recevra en
récompense un tiers de la ville, qu’elle revendra finalement au
comte Raymond-Bérenger IV.
1149 : Gênes, opportuniste, privilégie cependant ses intérêts
commerciaux et passe à cette date un accord avec le roi maure de
Valence.
1153
: Gênes passe une convention avec Savone, principale ville du
Ponant. Si Gênes est parvenue à étendre son district, dans les
terres et sur la côte, et à poser les bases de son empire maritime,
elle connaît alors une crise politique importante. D’après
Caffaro, « plongée dans un profond sommeil, pratiquement en
léthargie », elle est comme « un navire qui va sur les mers sans
capitaine ». La compagna, très endettée, peine à exercer son
pouvoir exécutif. Pour protester contre cette situation de fait, les
nouveaux consuls refusent un temps d’assumer le gouvernement de la
cité. Mais les événements extérieurs obligeront bien vite cette
dernière à dépasser ses difficultés internes.
Gênes, au cœur du conflit entre la papauté et l'empire, et acteur incontournable de la troisième croisade (de 1154 à 1192)
L’histoire génoise est marquée dans la seconde moitié du XIIe
siècle par les relations avec Frédéric Ier de Hohenstaufen, dit « Barberousse », alors que les conflits entre les partisans de la papauté
et ceux du Saint Empire romain germanique sont ravivés en Italie du
Nord. A peine élu sur le trône, en 1142, Frédéric Ier exige en
effet la reconnaissance de Rome et se rend deux ans plus tard dans la
péninsule afin d’obliger les Communes libres à prendre parti. En
réponse à cette incursion, Gênes, jalouse de son indépendance, se
dote d’une nouvelle enceinte qui transforme considérablement son
tissu urbain. Alliée à Milan, elle n’a d’autre choix cependant,
après la défaite de la cité lombarde, que d’accepter les
conditions imposées par l’empereur à la Diète de Roncaglia, en
1158. Mais elle fait vite volte-face et se range l’année suivante
du côté du pape Alexandre III, dont elle obtient d’ailleurs de
nombreux avantages. Frédéric Barberousse se rapproche alors de
Pise, ennemi héréditaire de Gênes, et à qui elle dispute le
contrôle de la Sardaigne. Mais si l’empereur fixe les limites du
district génois, empêche au-delà de Monaco l’expansion vers le
Var et favorise les seigneurs locaux, il ne parvient pas à imposer
sa domination à la cité ligure, dont il reconnaît officiellement
l’indépendance. Gênes jouera d’ailleurs un rôle majeur dans la troisième croisade (1189-1192), à laquelle l'empereur participe lui-même aux
côtés de Philippe-Auguste et de Richard Cœur de Lion, avant de
mourir en 1190. Pourtant, en dépit de son engagement en Terre Sainte,
Gênes, préoccupée avant tout par ses intérêts commerciaux,
n’hésite pas non plus à conclure des accords avantageux avec
certains princes musulmans, dont l’émir de Valence. A la fin du
XIIe siècle, elle affrète aussi régulièrement des bateaux pour le
transport vers la Mecque des pèlerins musulmans d’Espagne et du
Maghreb.
1154 : Frédéric Barberousse de Hohenstaufen, empereur du
Saint Empire romain germanique depuis 1152, se rend en Italie, afin
d’obliger les Communes, notamment celle de Gênes, à se prononcer
pour ou contre lui. La cité organise sa défense en faisant élever
au nord une nouvelle muraille, achevée en cinquante-trois jours et qui englobe
désormais San Siro. L’enceinte sera encore agrandie l’année
suivante, faisant passer Gênes de 20 à 42 hectares.
1155 : Tandis que Milan conteste l’autorité de Frédéric
Barberousse, Gênes se rapproche de Byzance dont elle accueille en
octobre le légat Demetrio Makrembolites, avec qui elle négocie des
accords commerciaux en échange d’une aide militaire.
Novembre 1156 : La Commune conclut aussi une alliance commerciale
avec le nouveau roi de Sicile, Guillaume Ier, qui promet de favoriser
sur l’île les Génois et d’écarter en revanche les Provençaux.
1156-1157 : Gênes s’allie avec Milan contre Frédéric
Barberousse.
Septembre 1158 : Milan capitule face à l’empereur germanique.
Novembre 1158 : Frédéric Barberousse, qui entend soumettre toute
l’Italie, convoque une Diète à Roncaglia. Les Génois refusent d’abord de payer le tribut demandé par l’empereur, mais finissent
quelques mois plus tard par s’y résoudre, tout en prêtant serment
de fidélité.
1159 : Election du pape Alexandre III.
1160 : Les murs de Gênes sont renforcés par une série de tours
flanquantes et comptent 1 070 créneaux. C’est la troisième
muraille de la ville.
1161 : Les Génois achèvent de construire l’enceinte fortifiée de
Portovenere, englobant l’ancien et le nouveau bourg. La même
année, ils renouvellent le traité de 1149 avec l’émir de
Valence. Frédéric Barberousse, enfin, concède le fief de Varese
Ligure à l’illustre famille génoise des Fieschi, dont les
descendants feront bâtir au XVe siècle le château que l’on
admire encore aujourd’hui.
1162 : En route pour la France, le pape Alexandre III est reçu avec
faste à Gênes pendant trois mois. A cette occasion, il confie à
l’archevêché la gestion du diocèse d’Albenga, dans la Riviera
du Ponant. La même année, trois cents marchands génois subissent à
Constantinople l’attaque d’un millier de Pisans et sont
contraints d’abandonner leurs biens. Gênes déclare alors la
guerre à Pise, qui conclut simultanément une alliance avec le
Saint Empire romain germanique. Frédéric Barberousse vient de
soumettre Milan. Cependant, face aux nombreuses victoires génoises, notamment en Sardaigne, il se résout à accorder à Gênes toute la
côte entre Monaco et Portovenere, et fait mine de reconnaître
l’indépendance de la Commune, tout en lui concédant des droits en
Sicile. Mais cet engagement restera sans suite, d’autant que
l’empereur continue de favoriser, notamment dans les terres,
l’ancien système féodal, en garantissant les prérogatives des
seigneurs locaux.
1164 : En Sardaigne, Barisone II d’Arborée soutient la nomination
de l’archevêque de Gênes comme primat et légat apostolique dans
l’île.
1165 : Sur la Riviera du Ponant, Albenga est attaquée et en partie
détruite par les Pisans qui contestent à son allié génois le
contrôle de la Sardaigne.
1168 : Gêne renouvelle une convention avec Savone.
1169 : Confirmation des accords passés en 1154 et 1161 avec les
Almohades d’Afrique du Nord et d'Espagne.
1170 : Comme Pise à la même époque, et en échange d’un soutien
militaire, la Commune de Gênes obtient de Byzance de nouveaux
avantages économiques et commerciaux : ainsi la libre circulation en
direction de la mer Noire et l’attribution d’un quartier entier
de Constantinople, dit « le Coparion ».
1171 : Le Coparion est attaqué par les Vénitiens.
1173 : Le rabbin espagnol Benjamin de Tudèle, l’un des plus grands
voyageurs du XIIe siècle, définit les Génois comme « les
seigneurs de la mer ».
1174 : La même année, Gênes conclut plusieurs accords de paix, l’un sur le continent avec les Malaspina, représentants de la
lignée des Obertenghi, et l’autre en Sicile avec les Normands de
Guillaume. En Sardaigne enfin, ils obtiennent contre les Pisans le
monopole du commerce.
1175 : A l’initiative de Frédéric Barberousse, Gênes et Pise
acceptent de respecter une trêve, mais elle restera de courte durée.
1178 : Construction d’un bourg fortifié à Chiavari, dans la
Riviera du Levant, alors que Gênes s’oppose dans la région aux
Fieschi, rivaux des Doria.
1179 : Gênes, rangée prudemment du côté guelfe, se voit confirmer
lors du troisième concile de Latran, les privilèges de son archevêché
par le pape Alexandre III.
1181 : Gênes renouvelle une convention avec Savone.
1184 : Au nord-est de l’actuelle Ligurie, dans les Apennins,
l’abbaye Saint-André-de-Borzone, fondée dans le courant du XIIe
siècle à partir des vestiges d’une forteresse byzantine, est
cédée aux moines bénédictins de Marseille. Aujourd’hui encore, c’est l’une des plus importantes abbayes bénédictines en
Italie.
1187 : En Terre Sainte, Jérusalem est reconquise par l’armée de
Saladin.
1188 : Dans ce contexte, les papes Grégoire VIII puis Clément III
veulent empêcher les forces chrétiennes de s’opposer entre elles
et obtiennent un accord de paix entre Gênes et Pise, stipulant « la
réciproque liberté d’aller par mer, de naviguer, d’accoster
dans un quelconque port et d’y échanger des marchandises ».
1189 : Début de la troisième croisade, à laquelle participent Richard
Cœur de Lion, Frédéric Barberousse et Philippe Auguste. Ce dernier
envoie Hugues III, duc de Bourgogne, auprès des Génois pour armer une
flotte capable de transporter 650 cavaliers, 1 300 chevaux et autant
d’écuyers. Tous s’embarquent au début du mois d’août. La
même année est consacrée dans le centre de Gênes l’église San
Donato, caractérisée par son clocher octogonal, qui inspirera au
XXe siècle les architectes de la tour San Benigno, un gratte-ciel
surnommé, « il matitone », c’est-à-dire le « gros crayon ».
10 juin 1190 : Mort de Frédéric Barberousse.
1191 : La commune de Savone, en
rivalité avec Gênes aspirant elle aussi à élargir son district,
rachète aux seigneurs Del Carretto le marquisat de Finale.
12 juillet 1191 : Acre tombe aux mains des croisés en grande partie grâce à la flotte des
Génois, qui en tireront ensuite de nombreux avantages.
1192 : Fin de la troisième croisade. Conrad de Montferrat, allié
des Génois, devient pour quelques mois roi de Jérusalem.
Après
1192 : Des navires génois transportent des pèlerins musulmans
d’Espagne et d’Afrique du Nord vers la Mecque.
L'inauguration de la Commune des podestats (de 1192 à 1250)
Au début du XIIIe siècle, Gênes, afin de dépasser les rivalités
entre les différents lignages, adopte une solution originale de
gouvernement. Elle confie en effet les rênes du pouvoir à un
podestat étranger originaire d’une autre cité, élu pour une année et en mesure d’arbitrer les conflits internes. Ce dernier
réunit en ses mains à la fois le pouvoir exécutif et judiciaire,
et l’assemblée, rarement consultée, se contente désormais
d’approuver – aux cris de fiat, fiat ! – des lois déjà
votées. Sur le plan extérieur, Gênes se range d’abord du côté
de Frédéric II, auquel elle fournit sur les mers de nombreux
amiraux, en échange d’importants avantages commerciaux. Mais
lorsque éclate véritablement le conflit entre guelfe et gibelins – c’est-à-dire entre partisans du pape et de l’empereur –, Gênes
se refuse à favoriser l’un ou l’autre parti dans le choix des
podestats et s’attire les foudres de Frédéric II, qui s’allie à
Pise, son ennemi héréditaire, et favorise dans les territoires du
district génois de nombreux soulèvements. Gênes se rapproche alors
de Milan et rejoint la ligue. Par ailleurs, la perte des avantages
concédés par l’empereur en Sicile oblige Gênes à se tourner sur
le plan commercial vers la Provence et le Maghreb, comme à contrôler
plus strictement son domaine.
1192 : Au moment où s’achève la troisième croisade, les Génois
réunis en assemblée décident d’abandonner le consulat et de se
doter d’un podestat étranger, à même, par son impartialité, de
diriger la cité. L’assemblée ne garde dès lors qu’un caractère
formel. A cette occasion, le sceau de la commune est modifié avec, à
la place de San Siro, l’image d’un griffon, emblème de la cité
et symbole de son pouvoir croissant en Orient.
1194 : Henri VI de Hohenstaufen, fils et successeur de Frédéric
Ier, se rend en Italie avant de gagner la Sicile. Il confirme alors
aux Génois le droit de battre monnaie, non sans leur avoir demandé
leur soutien naval et militaire, en échange d’accords commerciaux.
1196 : Pour réduire la rivalité entre les grandes familles de
Gênes et empêcher toute domination de l’une sur les autres, des
lois obligent les nobles à réduire à 80 pieds au maximum la
hauteur de leurs tours, comme en témoigne encore aujourd’hui la
Torre degli Embriaci.
28 septembre 1197 : Mort prématurée d'Henri VI. Or, celui-ci avait
annulé toutes les concessions promises aux Génois.
17 mai 1198 : Agé de 3 ans, Frédéric, fils de l’empereur
Henri VI, est couronné roi de Sicile.
A la fin du XIIe siècle : Gênes compte environ 30 000 habitants.
Elle signe un traité de paix avec Albenga en 1099, puis avec
Vintimille et Noli. Sur le plan commercial, elle est présente sur
les côtes atlantiques de l’Afrique septentrionale.
1204 : La quatrième croisade s’achève par le sac de Constantinople,
auquel ne participe pas Gênes. 1204 voit aussi le début de la
construction de la cathédrale de Santa Maria d’Assunta de Sarzana,
une ville qui sera annexée en 1592 par la république de Gênes. La
même année, l’aventurier génois Alamanno da Costa, surnommé « prince des pirates », s’empare de Syracuse et s’y fait
proclamer comte au nom de Gênes. Syracuse ne tarde pas dès lors à
devenir le centre du commerce de blé des Génois. Quelques années
plus tard, un autre pirate d’origine ligure, Guglielmo Grosso,
deviendra grand amiral de Sicile et comte de Malte.
1212 : Frédéric monte sur le trône de Germanie, mais souhaite
devenir empereur comme son père. Les Génois, qui ont obtenu
d’autres établissements, à Naples, Messine, Trapani, ainsi que
des exemptions douanières à Syracuse, le soutiennent lors du schisme
impérial, en lui envoyant notamment une flotte de quatre galères.
En mars, Frédéric débarque à Gênes et réside chez Nicolas
Doria.
1216 : Pour satisfaire les exigences du pape Innocent III, Frédéric
sépare les couronnes de Germanie et Sicile et cède cette dernière
à son fils Henri VII.
1217 : L’église San Stefano de Gênes est reconstruite en style
roman. Sa façade alternant bandeaux de marbres noirs et blancs
s’inscrit typiquement dans la tradition romane de Pise et de
Ligurie.
24 mars 1218 : Signature à Parme d’un traité de paix avec Venise.
1219 : Le pape obtient de Pise, Venise et Gênes qu’elles
participent ensemble à la cinquième croisade à Damiette, en Egypte.
1220 : Frédéric est couronné empereur du Saint Empire romain
germanique sous le nom de Frédéric II. Il confirme aux Génois
leurs précédents privilèges et leur accorde le droit de construire
une place-forte à Monaco.
A partir de 1225 : La poésie courtoise pénètre en Ligurie, proche
des pays de langue d’Oc, et inspire entre autres les compositions
du Génois Percivale Doria. A la même époque, la famille Doria,
fait agrandir près de Portofino l’abbaye bénédictine de San
Fruttuoso, qui surplombe la mer.
1225 : L’empereur se marie avec Isabelle-Yolande de Brienne,
héritière du royaume de Jérusalem.
Pâques 1226 : Frédéric convoque une diète à Crémone et annonce
son projet de restauration des droits impériaux en Italie, ce qui
déclenche la seconde Ligue lombarde.
Juillet 1226 : Les Génois n’adhèrent pas à la ligue et
obtiennent à Pontremoli la confirmation de leurs droits précédents.
Peu après, la Commune fait placer sur la façade de San Lorenzo un
griffon de bronze, symbolisant la gloire et la puissance et de la
cité.
1227 : Dans la rivière du Levant, Gênes est confrontée à un vaste
soulèvement de feudataires, orchestré par Frédéric II en
personne. Ce dernier prend officiellement Savone et Albenga sous sa
protection. Gênes s’empare alors de Savone, dont elle détruit les
murailles, les portes et le port. Peu après, Albenga, mais aussi
Alba, Alessandria et Tortona se rendent à leur tour. En quelques
mois, la Riviera est totalement pacifiée.
1227 : Conjuration sans suite de Guglielmo de Mari. La même année
est élu le pape Grégoire IX, proche des Génois. Il décide en
revanche d’excommunier Frédéric II, lui reprochant de ne pas
avoir tenu la promesse prononcée lors de son couronnement de lancer
la sixième croisade.
1228 : Naissance à Varazze de Jacques de Voragine, auteur de La Légende dorée. Ses cendres sont conservées dans l’église de
San Domenico, fondée en 1419. Parti finalement pour la croisade,
Frédéric II négocie avec le sultan d’Egypte de reprendre
Jérusalem.
1229 : Le podestat choisi cette année-là est Jacopo de Balduino,
célèbre juriste et maître de l’université de droit de Bologne.
1230 : Accords de San Germano. Le pape lève l’excommunication de
Frédéric II après avoir obtenu sa promesse de respecter les
libertés ecclésiastiques dans le royaume de Sicile. Construction
d’un môle dans le port de Gênes.
1231 : Frédéric II convoque la diète de Ravenne et demande à
Gênes de ne plus choisir de podestats originaires de cités acquises
à la ligue, mais se heurte à un refus sans appel.
1238 : Gênes se rallie à la ligue, en raison d’une rébellion dans
la Rivière du Ponant, une nouvelle fois appuyée par l’empereur.
1239 : Le pape Grégoire IX menace d’excommunier à nouveau
Frédéric II.
Août 1240 : Frédéric II envoie contre Gênes la flotte pisane.
1241 : Les Pisans remportent une éclatante victoire devant l’île
del Giglio. Seules cinq galères génoises peuvent s’enfuir sur vingt-sept.
Parmi les Génois, on compte 2 000 morts et blessés, 4 000 prisonniers
dont des archevêques, des évêques et trois légats du pape. Sur
les terres, les Rivières de Gênes sont à nouveau attaquées et
Lerici est prise par Pise. Dans la cité même de Gênes, les luttes
internes continuent. Pour la première fois apparaissent dans les
textes les termes de guelfes et de gibelins, les premiers étant
ralliés au pape et les seconds à l’empereur. Or, malgré
l’engagement guelfe de la Commune, les amiraux entrés au service
de l’empereur sont la plupart d’origine génoise, à l’exemple
de Niccolo Spinola. Le pape Grégoire IX meurt durant l’été.
1243 : Une flotte génoise échappe aux Pisans au large de Levento et
se rend à Civitavecchia, où elle embarque l’ancien cardinal
génois Sinibaldo Fieschi, élu récemment pape sous le nom
d’Innocent IV, et menacé par l’empereur. Peu de temps après,
Frédéric II se rend maître de Parme.
1246 : Durant la croisade de saint Louis, le commandement de la
flotte française est confié aux amiraux génois Ugo Lercaro et
Jacopo da Levanto.
18 février 1248 : Avec l’aide de six cents arbalétriers génois, les
Parmesans parviennent, en l’absence de l’empereur, à s’emparer
de Vittoria et de la totalité du trésor impérial.
13
décembre 1249 : Mort de Frédéric II.
Le premier âge d'or de Gênes (de 1250 à 1338)
Au milieu du XIIIe siècle, les partisans guelfes et gibelins se
déchirent à Gênes et favorisent à nouveau les conflits de
lignages. Ces troubles et luttes intestines, assortis d’une crise
financière et économique encouragent les Génois à désavouer le
podestat. Celui-ci est remplacé par un capitaine du peuple, en la
personne du banquier Guglielmo Boccanegra. Soutenu par les gibelins,
mais aussi par le popolo, notamment les artisans, il ne
concède pas pour autant à ces derniers, réunis en corporations,
les droits escomptés et affirme une conception autoritaire du
pouvoir. Il sera finalement chassé à son tour en 1262, malgré son
attitude clémente envers les guelfes. A cette date, cependant, il a
déjà engagé d’importants travaux d’urbanisme, avec, entre
autres, la rénovation de l’ancien port, et assisté au renouveau
économique de la cité, dont l’activité commerciale s’étend
désormais jusqu’en mer Noire et au-delà. Si les Génois
reviennent un temps au système gouvernemental du podestat, ils
instaurent à partir de 1270 celui d’une dyarchie, avec deux
capitaines du peuple. A l’intérieur, la paix civile n’est pas
garantie pour autant et Gênes demeure le théâtre de conflits
politiques, notamment entre guelfes et gibelins jusqu’au XIVe
siècle. Sur les mers, elle affirme sans cesse sa suprématie
militaire et commerciale, contre les Angevins, mais aussi contre
Pise, définitivement écrasée à la bataille de la Meloria, et
contre Venise, vaincue à la bataille de Curzola.
Vers 1250 : Premières exportations de draps génois.
1252 : première frappe de genovino, une monnaie d’or pur qui
permettra l’affirmation des marins et commerçants génois dans les
places les plus lointaines. Ils sont présents en effet non seulement
en Palestine et en Syrie, mais aussi en mer Noire et en mer
Caspienne, et, au-delà, en Perse, en Inde et jusqu’en Chine.
1253 : Le traité de paix avec Venise n’est pas reconduit. A Gênes
même, les Fieschi achètent quatre maisons à Guglielmo Doria et les
transforment en un palais pour Alberto Fieschi.
1256 : Albenga, Savone, Vintimille et Lerice, ne bénéficiant plus
du soutien de l’empereur, ont finalement pactisé avec Gênes.
Celle-ci a racheté aussi le château d’Andore. Génois et
Vénitiens s’affrontent à Acre, puis à Nègrepont et sur les
bords de la mer Noire. Portovenere aide Gênes dans la conquête
de Lerici de Pise. En remerciement, Gênes se serait engagée à
bâtir l’église San Pietro à Portovenere, mais sa construction ne
commencera qu’en 1277.
1257 : A cette date, le podestat devient capitaine du peuple en la
personne de Guglielmo Boccanegra, un riche banquier. L’ancien
podestat avait en effet suscité la colère de l’assemblée par ses
malversations et avait été écarté au cri de « Fiat populus ».
Sur le sceau communal, le griffon est remplacé par le symbole
pacifique de l’Agnus Dei.
1258 : Le 24 juin, la flotte génoise est finalement battue par les
Vénitiens, alliés aux Pisans devant le port d’Acre. Gênes perd
une position fondamentale sur le plan économique. Son activité
commerciale se déplace alors vers Tyr, Sidon et Tripoli. A la même
époque, la lutte contre Pise est attisée en Sardaigne.
1259 : Les nobles guelfes ourdissent un complot contre Boccanagra.
Ils sont d’abord bannis et leurs maisons détruites.
1260 : L’année suivante Boccanegra accorde son pardon à ses
anciens adversaires, qui reviennent dans la cité. Il charge
l’architecte Fra Ilivieri, moine cistercien, d’agrandir le port de
Gênes et de construire un palais qui deviendra siège du
gouvernement sous le nom de palais de la Mer à partir de 1270. C’est
l’actuel palais San Gorgio.
13 mars 1261 : Traité de Nymphée avec l’empereur byzantin, Michel
Paléologue, qui en échange d’un soutien militaire sur les mers, accorde aux Génois des droits exclusifs sur le commerce de la mer
Noire. Pour le pape, il s’agit d’une véritable trahison
vis-à-vis de la Chrétienté latine. Manfred, roi de Sicile, occupe
à cette date la Sardaigne et concède aussi aux Génois de nombreux
privilèges.
1262 : Vintimille tombe aux mains de Gênes. En mai, Boccanegra est
finalement destitué par les aristocrates qui restaurent le
gouvernement de podestat. Réfugié en France, il entre au service de
saint Louis qui le charge de construire les murs d’Aigues-Mortes. A
Gênes, les grandes familles – ainsi les Grimaldi, les Fieschi, les
Spinola et les Doria – recommencent à s’affronter.
1267 : Les Génois installent un quartier à Constantinople,
redevenue capitale byzantine en 1261.
1269 : Le nouveau roi de Sicile, Charles Ier d’Anjou, exige de la
Commune de ne plus choisir de podestat parmi le camp gibelin, et
suscite ainsi à Gênes de nombreux troubles politiques.
2 juillet 1270 : Participation génoise à la huitième croisade dirigée
par saint Louis.
25 août 1270 : A la mort de saint Louis, le commandement de la
flotte passe à son frère Charles d’Anjou. Or, ce dernier n’aspire
qu’à étendre son hégémonie sur l’Italie et suscite de vives
inquiétudes à Rome comme à Gênes.
28 octobre 1270 : Les Grimaldi sont expulsés ainsi que le podestat
parmesan Rolando Putagio. Il est remplacé par deux capitaines de la
Commune, Oberto Spinola et Oberto Doria. Oberto Spinola s’installe
dans le palais construit pour Alberto Fieschi en 1253. Transformé
depuis à plusieurs reprises, il s’agit de l’actuel Palazzo
ducale.
1274 : Les Génois affrontent les forces de Charles Ier d’Anjou en
Corse et en Sicile, où ils attaquent Messine. L’amiral Pignatorio
fait ensuite défiler dans la baie de Naples ses galères
victorieuses et traînant dans l’eau les étendards royaux.
Vers 1275 : Fondation en Crimée de la colonie de Caffa sur des
terres vendues aux Génois par le khan des Tartares.
18 juin 1276 : Le pape Innocent V, proche des Génois, fait cesser le
conflit avec les Angevins par le traité de Rome.
1277 : Construction de l’église San Pietro à Portovenere, face à
la mer. La façade, typique de l’art roman local, est striée de
bandeaux en pierre noire et blanche.
1283 : Nouveaux travaux d’agrandissement du port de Gênes en
partie financés par le butin de l’opération menée par l’amiral
Tommaso Spinola contre les Pisans dans les eaux de Sardaigne et de
Corse.
1284 : Bataille de la Meloria, au large de Livourne, en mer
Tyrrhénienne, qui s’achève, sous le commandement d’Oberto Doria
et de Benedetto Zaccaria, par la victoire écrasante de Gênes contre
Pise. Avec vingt-neuf galères prises, sept coulées, plus de 8 000 prisonniers,
et près de 5 000 morts, Pise ne se relèvera pas et entamera un long
déclin avant son annexion par Florence en 1406.
1287 : L’envoyé du khan Argun, Rabban Sauma note au cours de son
voyage à Gênes : « Dans ce lieu, il n’y a pas de roi : le peuple
choisit selon son plaisir un chef qui le gouverne. »
1er janvier 1289 : A la suite d’une insurrection guelfe rapidement
maîtrisée, mais révélatrice d’un malaise, les institutions
génoises sont en partie modifiées. On décide que nobles et gens du
peuple se partageront les charges de conseillers, on réévalue la
fonction de l’assemblée et on remplace les deux capitaines locaux
par un capitaine « à perpétuité étranger à la cité de Gênes »,
mais soutenu par un abbé du peuple.
1290 : Gênes détruit les ports de Pise et de Livourne.
Mai 1291 : Deux siècles avant Vasco de Gama, les Génois Ugolino et
Vadino Vivaldi partent pour les Indes « à travers la mer océane »,
franchissent Gibraltar et disparaissent aux confins de l’Afrique
noire.
1292 : L’amiral génois Benedetto Zaccaria entre au service du roi
de Castille afin de défendre Gibraltar contre les Mérinides
marocains. Le 13 avril, le pape Nicolas IV nomme archevêque de Gênes
le dominicain Jacques de Voragine, auteur de la célèbre Légende
dorée.
1293 : Philippe le Bel engage des Génois à la tête des chantiers
navals de Rouen. On compte parmi eux Alberto Spinola et, surtout, Enrico Marchese, dit « Henri le Marquis ». Benedetto Zaccaria les y
rejoint l’année suivante et est nommé amiral pour la couronne de
France.
1295 : Le pape Boniface VIII obtient la paix de Gênes et de Venise.
Il évoque « une paix générale et universelle dans la cité de
Gênes entre ceux qui se faisaient appeler gibelins et ceux qui se
faisaient appeler guelfes, parmi lesquels existaient de grandes
oppositions, de nombreuses divisions et des discordes périlleuses ».
Mais, dès la fin décembre, les affrontements reprennent dans la
cité, théâtre de nouveaux troubles politiques. Un double capitanat
dirigé par les gibelins Corrado Spinola et Corrado Doria est mis en
place.
Entre 1296 et 1298 : Jacques de Voragine rédige à la fin de sa vie
sa Chronica civitatis Januensis (Chronique de la ville de Gênes).
1297 : Le capitaine Corrado Doria se met au service du nouveau roi de
Sicile Frédéric II, en tant que grand amiral. Or, ce souverain est
l’adversaire du pape Boniface VIII. La même année, le pontife
reçoit hommage et serment de fidélité du roi d’Aragon pour le
royaume de Sardaigne et de Corse.
7 septembre 1298 : Bataille de Curzola, au large de la Dalmatie dans
l’Adriatique. Sous le commandement de Lamba Doria, les Génois
écrasent alors les Vénitiens, dont ils brûlent soixante-six galères et en
coulent dix-huit autres. Pour remercier l’amiral victorieux, Gênes lui
offre un palais construit quelques décennies plus tôt sur la piazza
San Matteo, encore appelé aujourd’hui le Palazzo di Lamba Doria.
1299 : Paix signée à Milan avec Venise à l’avantage de Gênes
qui s’assure la suprématie dans le Bosphore et en mer Noire.
Au début du XIVe siècle : Gênes compte autour de 50 000 habitants.
22 novembre 1311 : Gênes et son domaine sont cédés à Henri
VII, afin de mettre fin aux dissensions entre guelfes et gibelins.
1312 : La darse du port de Gênes agrandie et fortifiée d’une
première tour.
1312 : Début de l’expédition en mer de Malocello, qui découvrira
les Canaries.
1313-1314 : Dans le domaine de la sculpture, le monument funéraire de Marguerite de Brabant, morte à Gênes en 1311, est l’une des
réalisations les plus notables de cette période. Visible
aujourd’hui au museo di Sant’Agostino à Gênes, il fut
commandité par l’empereur Henri VII au Toscan Giovanni Pisano.
24 août 1313 : L’empereur Henri VII meurt prématurément près de
Sienne.
10 novembre 1317 : Coup d’Etat à Gênes entraînant le départ
des gibelins. Les Doria et les Spinola, chefs des exilés, reviennent et
imposent à la ville un blocus, comparé par les contemporains au
siège de Troie. Les Grimaldi et les Fieschi, à la tête des
guelfes, obtiennent le soutien de Robert d’Anjou, qui envoie en
renfort 1 200 soldats et vingt-cinq galères.
27 juillet 1318 : Le gouvernement de Gênes est officiellement confié
à Robert d’Anjou devant la cathédrale San Lorenzo. Celle-ci est
achevée dans les premières décennies du XIVe siècle en style
gothique.
1320 : La Sardaigne est abandonnée aux Aragonais qui chercheront
ensuite, sans succès, à dominer la Corse.
2 septembre 1331 : La paix de Naples met fin aux blocus et apaise
temporairement les tensions entre les guelfes et les gibelins.
1335 : Les gibelins reconquièrent le pouvoir et mettent à nouveau
en place le système de la dyarchie avec l’élection de deux
capitaines du peuple, Raffale Doria et Galeotto Spinola.
1337
: Début de la guerre de Cent Ans, durant laquelle s’illustreront
les arbalétriers génois comme mercenaires au service du roi de
France. Celui-ci recevra aussi un soutien sur les mers, avec le
renfort, dès 1338, de vingt galères génoises.
Le régime dogal à la fin du Moyen Age (1339-1499)
En 1339 commence la période des doges dits « perpétuels », mais dont la
plupart n’exerceront le pouvoir que de manière éphémère. Le
premier, Simon Boccanegra, sera ainsi écarté cinq années plus tard
au profit de Giovanni de Murta, avant de reprendre les rênes du
gouvernement en 1356. Riche commerçant, issu du peuple, il défendra plutôt ses propres intérêts que ceux de ses semblables, et mènera
un train de vie princier. Après sa mort, en 1363, on instaure de
nouvelles lois permettant au popolo d’être
pleinement représenté. Les Fregoso et les Adorno, puissantes
figures de la classe émergente, se disputent désormais la fonction
de doge, et arborent respectivement, en symbole de leur propre clan,
le noir et le blanc. Or, en 1391, une conspiration menée contre le
doge Antonietto Adorno oblige ce dernier à fuir. Au terme de
tractations secrètes, il favorise alors la soumission de Gênes à
la France. Dès 1401, le gouvernement de la cité est ainsi confié
au maréchal Boucicaut, avant que celui-ci ne soit déchu en 1409.
Mais, à peine l’indépendance retrouvée, sont ravivées les vieilles
querelles intérieures, tandis qu'Alphonse V d’Aragon, en rivalité
avec elle sur la Corse, cherche par tous les moyens à soumettre
Gênes et à se venger ainsi de la défaite infligée à Ponza en
1435. Finalement, Gênes sera à nouveau cédée à la couronne de
France en 1458, pour passer cinq années plus tard sous le contrôle
des Sforza de Milan. Cette période est aussi marquée par la
terrible épidémie de peste noire, par la chute de Constantinople qui ferme à Gênes les portes de débouchés commerciaux majeurs, et
par la création de la banque Saint-Georges qui ne tardera pas à
s’affirmer comme l’un des plus importants organes financiers en
Europe.
24 septembre 1339 : Le riche commerçant Simon Boccanegra (1301-1362)
est élu premier doge « perpétuel » de Gênes en remplacement des
capitaines du peuple. Il donnera son nom à un opéra de Giuseppe
Verdi.
1343 : Egidio Boccanegra, frère de Simon, devient grand amiral du
royaume de Castille. La même année, la pression des Turcs conduit
les Génois à une alliance de courte durée avec Venise.
Décembre 1344 : Simon Boccanegra est chassé de Gênes et remplacé
par le banquier Giovanni de Murta.
1346 : Sous le commandement de Simone Vignoso, les Génois prennent
Chio et Phocée, deux positions stratégiques essentielles entre
l’Occident et la mer Noire, briguées aussi par Venise.
1348 : La peste noire décime la population génoise. Sur les 54 000
habitants que compte alors la cité, 20 000 vont trouver la mort.
Janvier 1350 : Le doge Giovanni de Murta est emporté à son tour et
remplacé le 9 janvier par Giovanni de Valente. Peu de temps après,
débute avec Venise la guerre de Caffa, capitale de Crimée et
nœud fondamental du commerce avec l’empire mongol, mais aussi la
Chine, d’où Gênes fait venir la soie.
13 février 1352 : Victoire génoise à la bataille du Bosphore.
Gênes prend le contrôle des villes byzantines du Danube.
1353-1355 : Le 9 octobre 1353, le doge Giovanni de Valente renonce à
sa charge suite à la défaite de la flotte génoise à Porto Conte
contre quatre-vingt galères vénéto-catalanes. L’archevêque milanais
Giovanni Visconti s’impose alors à Gênes comme arbitre, mais, à sa
mort l’année suivante, ses neveux tentent de prendre le pouvoir.
S’ensuit une période de troubles politiques.
1356 : Simon Boccanegra en profite pour revenir à Gênes et s’y
imposer par la force. Après s’être emparé du Palazzo Ducale, il
est proclamé doge.
1358 : Libre dédition de la Corse au gouvernement génois, pour
contrer toute tentative de domination par l’Aragon.
1360 : La darse du port de Gênes est agrandie et fortifiée d’une
seconde tour.
13 mars 1363 : Au lendemain d’un banquet en l’honneur du roi de
Chypre, Simon Boccanegra trouve la mort, sans doute par
empoisonnement. Le riche Gabriele Adorno est désigné comme doge, et, par des lois, fait reconnaître comme seul groupe dirigeant les
populares, répartis entre marchands et artisans. Il gouverne
avec le conseil des Anciens, l’assemblée des Quarante et celle des
Trois-Cent-Vingt, et est assisté du podestat, un magistrat chargé
de la justice, et du vicaire, un juriste étranger.
1367 : Gabriele Adorno est remplacé par Donemico Fregoso. Désormais,
des représentants de ces deux familles vont se disputer pendant deux
siècles le pouvoir.
A partir de 1368 : La chute de l’empire mongol à Pékin et
l’avancée progressive des Turcs vers l’Occident appauvrissent le
commerce de la Crimée au profit de celui de l’Egypte, dont les
Vénitiens ont affirmé le monopole.
1371 : Engagés dans la guerre de Cent Ans, Ambrogio Boccanegra et sa
flotte castillane l’emportent sur une escadre anglaise trois fois
plus importante, lors de la bataille de la Rochelle.
1372 : Gênes l’emporte à Chypre contre les Vénitiens.
1376-1381 : Guerre de Ténédos, où les Vénitiens se sont
installés, au nord de la mer Egée pour contrôler les Dardanelles.
17 juin 1378 : Nicola di Guarco est élu doge.
27 août 1378 : Pour enrayer en partie la dette publique, la
république de Gênes cède la gestion de la Corse à un consortium
génois de citoyens privés. Elle sera par la suite confiée à la
banque Saint-Georges.
1379-1380 : Guerre de Chiogga en Vénétie, à l’avantage d’abord
des Génois puis des Vénitiens.
8 août 1381 : Sous les auspices d’Amédée VI de Savoie, signature
du traité de Turin qui met fin au conflit avec Venise.
Mars 1383 : Une révolte populaire dirigée par les bouchers de la
cité oblige le doge à capituler. Il est remplacé par Leonardo de
Montaldo, emporté par la peste quinze mois plus tard.
1384 : Antoniotto Adorno est élu doge.
1390-1391 : Conspiration de Pietro Campofregoso qui prend le pouvoir
et contraint Antoniotto Adorno à fuir.
A partir de 1394 : Le peintre Nicolo da Voltri, né à Gênes, est
actif dans la cité jusqu’en 1417. Sa Vierge à l’Enfant
datée de 1401 est encore visible aujourd’hui dans l’église San
Donato.
1394 : Antoniotto a tenté de reprendre le pouvoir en s’appuyant
sur les Visconti, mais, dès 1394, traite secrètement avec le roi de
France.
1396-1397 : Une assemblée génoise désigne le souverain français
comme seul capable de rétablir la paix. Un traité de soumission de
Gênes à la France est signé le 4 novembre. Gênes n’a plus de
doge, mais Antoniotto est institué vicaire royal, avant de se retirer
le 18 mars 1397.
Janvier 1400 : Le gouverneur français Collart de Calleville s’enfuit
à Savone laissant Battista Boccanegra, fils de Simon, s’attribuer
ses anciennes prérogatives.
Mars 1401 : Jean Lemeingre dit « Boucicaut », maréchal de France, est
finalement désigné comme gouverneur. Violent et cruel, il n’hésite
pas à faire décapiter Battista Boccanegra et à exposer sa tête en
place publique.
Août 1404 : Boucicaut impose à Gênes l’obédience avignonnaise
dans le contexte du grand schisme, mais celui-ci prendra fin treize
ans plus tard.
1407 : Fondation de la célèbre banque de Saint-Georges. Institution
privée, elle est dirigée par des membres de l’oligarchie génoise,
perçoit les principaux droits d’entrée dans le port, mais accorde
en retour d’importants prêts financiers à l’Etat génois.
Soutien important du commerce en Orient, elle sera aussi sollicitée
par de nombreux dirigeants européens, et bénéficiera les deux
siècles suivants d’un véritable rayonnement international.
3 septembre 1409 : Les Génois déclarent déchu le gouvernement
français. Le marquis Teodoro de Montferrat, gendre d’Obizzo
Spinola, devient gouverneur trois jours plus tard.
4 juillet 1415 : Tomaso di Campofregoso est acclamé doge une
première fois. A la fin de l’année, il débourse 60 000 ducats-or
sur sa fortune personnelle pour diminuer la dette de la république.
3 novembre 1421 : Tomaso di Campofregoso cède Gênes à
Milan pour la somme de 30 000 florins et l’attribution de la
seigneurie de Sarzana. Filippo Maria Visconti devient maître de
Gênes.
1426 : Etabli à Gênes, le peintre Donato de Bardi, originaire de
Pavie, devient officiellement « pictor ». Son principal
chef-d’œuvre, la Crucifixion, d’inspiration nordique, est
conservé à la pinacothèque civique de Savone.
De la même époque, le musée conserve aussi des œuvres du siennois Taddeo di Bartolo, qui fut actif aussi en
Ligurie.
5 août 1435 : La bataille de Ponza, dans la mer Tyrrhénienne,
s’achève par l’éclatante victoire de Gênes contre les
Aragonais, qui déplorent la perte de onze galères, tandis que le roi
d’Aragon et celui de Castille sont faits prisonniers.
1436 : La peste succède en Ligurie à la famine. Francesco Spinola, qui s’était déjà illustré l’année précédente dans la
bataille de Ponza, délivre Gênes des troupes du duc de Milan. Le 3
avril, Tommaso Campofregoso est élu doge à nouveau. Ce second
dogat, renouvelé en 1437, durera six années et sera marqué par la
poursuite de la lutte contre le roi d’Aragon.
18 décembre 1442 : Tomaso Campofregoso est destitué par ses
opposants.
28 janvier 1443 : Raffale Adorno est acclamé doge. Alphonse V, ne
désarme pas et ne cesse de s’opposer à Gênes.
7 avril 1444 : Signature d’un traité de paix avec Alphonse V mais
dont les conditions sont jugées humiliantes pour Gênes. Celle-ci
est convoitée à la fois par Philippe le Bon, duc de Bourgogne, et
par le roi d’Aragon, dont les partisans respectifs cherchent à
s’affirmer à la tête de la cité.
1448 : Début de la construction dans la cathédrale San Lorenzo de
la grande chapelle Saint-Jean-Baptiste en style gothique flamboyant.
Elle ne sera achevée qu’en 1532. La même année, Pietro
Campofregoso, neveu de Tomaso, devient doge.
Vers 1450 : L’église génoise Santa Maria di Castello, datée du
IXe siècle, est agrandie par les dominicains, notamment d’un
cloître décoré d’une fresque de Justus von Ravensburg,
commanditée par la famille Grimaldi.
1451 : Naissance de Christophe Colomb à Gênes.
1453 : La prise de Constantinople par les Ottomans prive Venise et
Gênes d’une partie de leurs bases maritimes et commerciales.
1458 : Le doge Pietro cède la république de Gênes au roi de France
Charles VII. Jean, duc d’Anjou et de Calabre, fils du roi René, y
est alors nommé gouverneur. La période de domination française
dure cinq ans et est marquée entre autres par deux épidémies
successives de peste.
1460 : Louis XI fait appel à des artisans génois pour développer
l’industrie de la soie à Tours.
Avril 1464 : Les Sforza affirment sur Gênes leur domination. Louis
XI, proche du duc et de la duchesse de Milan – Francesco Sforza et
Bianco Maria Visconti – ne s’y oppose pas. Les quatorze années de
gouvernement milanais sont placées sous le signe de la paix
retrouvée, notamment avec le roi d’Aragon et avec Ferrante de
Naples.
30 novembre 1466 : Naissance d’Andrea Doria, amiral et mécène,
figure majeure de la Renaissance génoise.
1475 : Les Ottomans prennent Caffa aux Génois et les chassent de
l’archipel.
1478 : Les troupes milanaises de Gian Galeazzo Sforza, fils de
Francesco et de Bianco Maria, sont expulsées de Gênes. Prospero
Adorno puis Battistino Campofregoso, fils de Pietro, deviennent
successivement doges. A cette date et jusqu’en 1501, le peintre
milanais Carlo Braccesco est attesté en Ligurie, notamment à Gênes.
1481 : Cristoforo Grassi peint une vue panoramique de Gênes, dont
témoigne encore aujourd’hui une copie réalisée 1597 et conservée
au Museo civico navale de Pegli, une commune intégrée à la ville
de Gênes en 1926.
1487 : Guerre de Sarzana. La ville située non loin de La Spezia est
en effet disputée aux Génois par Laurent de Médicis. Malgré leur
riposte militaire, les Génois sont battus et Sarzana capitule le 22
juin.
1488 : Les forces milanaises se rendent maîtresses de Gênes.
1492 : Christophe Colomb découvre l’Amérique au service du roi
d’Espagne.
1493 : Le duc de Milan, Ludovic Sforza, dit « le More », conclut
une paix avec l’Espagne pour Gênes. Les Génois arment des galères
destinées à contrer la descente de Charles VIII en Italie et se
rangent derrière la politique anti-française des Milanais.
1495
: En représailles, les Génois sont expulsés de France et ne
peuvent plus participer aux grandes foires, notamment à celle de
Lyon.
Le siècle des Génois (1499-1637)
Un document daté de la fin du XVe siècle insiste sur la singularité
de Gênes, qui ne peut tirer sa richesse de la terre, ici aride et
ingrate : « Cette cité ne vit pas comme les autres qui ont des
champs et des biens, dont elles peuvent tirer leur alimentation comme
elles le désirent. » Or, si Gênes devait jusqu’ici sa puissance à
son vaste empire maritime et commercial, elle s’affirme à partir
du XVIe siècle comme une véritable capitale de la finance
internationale, même si les principaux bénéficiaires de cette
évolution sont avant tout de puissants particuliers, et non l’Etat
génois lui-même. En même temps, Gênes réaffirme haut et fort son
statut d’Etat autonome, et choisit finalement contre la France le
camp des Habsbourg, dont elle devient, à travers ses prestigieux
financiers, le premier banquier. Après avoir servi François Ier,
l’amiral Andrea Doria place ainsi la cité sous la protection de
Charles Quint et instaure, au nom de la liberté, la république
oligarchique, définie par les lois dites « de 1528 ». En 1559, au
lendemain de la paix de Cateau-Cambrésis, Gênes fait ainsi partie,
avec Venise et Lucques, des rares cités de la péninsule où
survivent les institutions républicaines, héritées de la période
des communes. Elles seront consolidées et modernisées en 1576 par
les lois dites « de Casale », qui marquent véritablement l’avènement
de l’Ancien Régime. Par ailleurs, tout au long du « siècle des
Génois », les aménagements urbains de grande ampleur, la création
de la Strada Nuova et de la Strada Balbi attestent le prestige de
Gênes la Superbe, celle que Rubens n’hésite pas à nommer « la
cité des palais ».
1499 : Les Français s’emparent de Gênes qui passe sous le
gouvernement direct du roi Louis XII. Jusqu’à présent, les
charges des différents magistrats et conseillers étaient réparties
pour moitié entre le popolo et la noblesse,
mais cette dernière est désormais largement favorisée par le
souverain français.
1506-1507 : En réaction, éclate en 1506 la révolte des cappette,
un mouvement populaire qui doit son nom au vêtement modeste de ses
représentants : « une étroite et méchante cape ». Des membres de
l’aristocratie sont massacrés ou, comme les Doria, contraints à
l’exil, leurs palais pillés. Les cappette réclament que
les deux tiers des postes soient accordés au popolo
et un tiers seulement à la noblesse. Au début de l’année
1507, Louis XII déclare la cité rebelle et charge Jean Marot
d’écrire un poème officiel sur les « mutinations » génoises.
La ville est bombardée, mais la révolte perdure et, le 10 avril, le
teinturier Paolo da Novi est élu doge, tandis qu’on remplace les
armoiries françaises par celles de l’empereur Maximilien de
Habsbourg. En présence de Louis XII, les troupes françaises donnent
l’assaut le 25 avril. Gênes se rend le 27, déplore 1 400 morts et
de nombreux blessés. Paolo da Novi est pendu, sa dépouille découpée
et exposée aux quatre coins de la ville. Louis XII fait annexer
Gênes au domaine royal et y ordonne la construction d’une nouvelle
forteresse, appelée La Lanterne.
1513 : Le peintre Louis Brea (1443-1523), né à Nice mais actif en
Ligurie, en particulier sur la Riviera du Ponant, réalise La
Vierge du Rosaire, conservée dans le couvent Saint-Dominique de
Taggia, où l’on peut aussi admirer de sa main le polyptyque du
Baptême du Christ, réalisé en 1495. Si Gênes retrouve son
indépendance grâce à la défaite française à Novare, elle est à
nouveau le théâtre de violents conflits intérieurs. Le doge
Ottaviano Fregoso fait ainsi tailler en pièces le comte Gieronimo
Fieschi, dont le corps est attaché à la queue d’un cheval et
traîné par les rues de la ville.
1514 : Après avoir chassé les Français et détruit le fort de La
Lanterne, Ottaviono Fregoso fait finalement alliance avec François
Ier. Les Adorno et les Fieschi se rangent du côté du nouvel
empereur Charles Quint.
1520 : Début de la construction de l’église Santissima
Annunziata del Vastato dans le quartier des Strada Nuove. Elle sera
remaniée deux fois par la suite aux XVIe et XVIIe siècles.
30 mai 1522 : Sac de Gênes par les troupes espagnoles de Charles
Quint, qui n’épargnent que les biens et les propriétés des
Adorno et des Fieschi. Andrea Doria, de son côté, est passé au
service de la couronne de France, pour laquelle il devient général
des galères.
23 et 24 février 1525 : Bataille de Pavie, durant laquelle François
Ier est fait prisonnier.
14 janvier 1526 : Signature du traité de paix de Madrid. François
Ier est libéré, mais laisse ses fils en otage et renonce à ses
droits en Italie.
1527 : Naissance à Moneglia du peintre maniériste Luca Cambiaso,
dit « Le Cangiage », dont on admire encore aujourd’hui les œuvres dans
la chapelle Lercari de la cathédrale San Lorenzo de Gênes, ainsi
qu’au sanctuaire de la Madonna delle Grazie, près de Chiavari.
La même année, l’amiral André Doria, au service
du roi de France depuis 1522, disperse vingt-deux vaisseaux venus d’Espagne
et parvient à entrer dans le port de Gênes, alors sous le joug des
impériaux.
1528 : L’ingratitude de François Ier, qui favorise Savone contre
Gênes et nomme Jacques de Trivulce gouverneur de la cité, incite
Andrea Doria à changer de camp. Le 12 septembre, il entre dans
Gênes, qu’il place sous la protection de l’empereur, tout en
faisant garantir son indépendance. Lors d’une assemblée
populaire, il exhorte en effet les habitants à reprendre possession
de la cité et à dépasser les vieilles oppositions intestines au
nom de la liberté. Douze réformateurs se chargent de rédiger de
nouvelles lois publiées en octobre et fondent ainsi la république
oligarchique. Ces lois stipulent entre autres la création d’un
livre officiel contenant la liste des membres de l’aristocratie,
liste non définitive mais sur laquelle peuvent s’inscrire chaque
année onze nouveaux membres issus de la bourgeoisie. Peu de temps
après, la ville de Savone, qui s’opposait à Gênes avec l’appui
des Français, est soumise définitivement. Andrea Doria et Sinibaldo
Fieschi, les deux figures les plus illustres du nouveau régime,
viennent en prendre officiellement possession au nom de la
république.
1529 : Andrea Doria fait construire à Fassolo, à l’époque à
l’extérieur des remparts, le Palazzo Principe, dit aussi « Palazzo
Doria Pamphili », sur les vestiges d’anciens bâtiments détruits par
les Français. Pour le décorer, il fait venir à Gênes le sculpteur
Giovanni Agnolo da Montosorli et le peintre Perino del Vaga,
respectivement élèves de Michel-Ange et de Raphaël et contraints
de fuir la Ville éternelle après le sac de Rome en 1527. Mais
Girolamo de Trévise puis le Pordenone et Domenico Beccafumi sont
aussi sollicités. Demeuré propriété privée, ce somptueux
bâtiment, entouré de jardins, appartient toujours à la famille
Doria Pamphili.
1533 : L’empereur Charles Quint séjourne au Palazzo Principe.
1535 : Le palais Saint-Georges est considérablement agrandi.
1540 : Montosorli sculpte la colossale statue d’Andrea Doria, dont
la république avait voté la réalisation en 1528.
1543-1547 : Montosorli sculpte le décor intérieur de l’église
San Matteo. A la même époque, le peintre florentin Bronzino
(1503-1572) représente Andrea Doria sous les traits de Neptune, œuvre aujourd’hui exposée au Palazzo del Principe. Par ailleurs, en 1543, est édifiée La Lanterne, en remplacement du phare édifié au XIIe
siècle, reconstruit ensuite par Louis XII, puis détruit à nouveau
par ses adversaires.
2 janvier 1547 : Une révolte éclate à Gênes, ourdie par Giovanni
Luifi Fieschi, comte de Lavagna. Soutenu par le peuple et les
artisans, mais aussi par les membres de la nouvelle noblesse, il
cherche à obtenir l’appui du pape et du roi de France. Mais il ne
parvient pas à ses fins : au moment de crier victoire, après
l’assassinat du neveu et successeur désigné d’Andra Doria, il
se noie accidentellement dans le port de Gênes. Ses
partisans sont dispersés et les membres du clan Fieschi poursuivis
sans relâche par Andrea Doria. Ce dernier s’empresse de faire
adopter la loi dite « du Garibetto », renforçant l’oligarchie et le
poids de la noblesse ancienne. La même année, les jésuites
s’installent à Gênes, où ils bénéficieront d’un immense
prestige.
1548 : Dans la commune d’Albaro, qui sera intégrée au Grand Gênes
en 1926, l’architecte pérugin Galeazzo Alessi dessine la villa
Giustiniani Cambiaso.
1549 : Galeazzo Alessi se voit confier le chantier officiel de la
basilique de Santa Maria Assunta in Carignano dans le centre de
Gênes. Il s’inspire alors à échelle plus réduite des plans
dessinés par Bramante pour Saint-Pierre-de-Rome. L’édifice sera
achevé cinquante ans plus tard.
1550 : Début de la construction de la Strada Nuova, l’actuelle
voie Garibaldi, dessinée par Galeazzo Alessi en ligne droite sur 280
mètres et comptant aussi 280 mètres de largeur. Bordée peu à peu
de palais plus somptueux les uns que les autres, construits entre
autres par Galeazzi Alessi et par ses élèves Bernerdino Cantone et
Giovannni Ponzello, elle sera achevée en 1585, puis remaniée au
XVIIe siècle. D’après Vasari, « beaucoup de personnes affirment
qu’aucune autre ville d’Italie ne possède une rue plus
magnifique ».
1553 : Soutenus par les galères françaises, les Turcs affrontent
Gênes et remportent dans la mer Tyrrhénienne la bataille de Ponza
contre Andra Doria, âgé de 86 ans. Les Français s’emparent alors
de la Corse, à l’exception de Calvi. Dans le port de Gênes,
Galeazzo Alessi construit la Porta del Molo à des fins défensives, mais aussi fiscales : c’est là que seront récoltées les impôts.
1556 : Construction du palais San Bartolomeo degli Armeni pour Tobia
Pallavicino par l’architecte Giovan Battista Castello, dit « le
Bergamasque ». Galeazzo Alessi ajoute un dôme Renaissance à la
cathédrale gothique San Lorenzo. La même année naît à Gênes le
peintre Lazzaro Tavarone, auteur d’une partie des fresques ornant
la façade du Palazzo San Giorgio, réalisée en 1601-1608, mais
redécouverte seulement dans les années quatre-vingt-dix au cours d’une
restauration.
1559 : Traité de Cateau-Cambrésis qui prévoit, entre autres, la
restitution de la Corse à Gênes.
25 novembre 1560 : Mort d’Andrea Doria à l’âge de 93 ans. Sa
disparition ravive les antagonismes entre les membres de la vieille
noblesse et ceux de la nouvelle noblesse, issue du peuple.
1564 : Début de la guerre de Sampiero pour reprendre la Corse. Elle
s’achève en 1569.
1565 : Début de la construction du Pallazio Doria Tursi, devenu
depuis 1848 l’hôtel de ville de Gênes. A la même époque,
l’architecte Andrea Ceresola, dit « le Vannone », réaménage le Palazzo
ducale et lui donne ses dimensions monumentales actuelles.
1570 : Construction de la bourse de Gênes, la Loggia dei Banchi,
d’après les plans de Galeazzo Alessi.
Mars 1571 : Les Espagnols occupent à partir de cette date le
marquisat de Finale, à mi-distance entre Gênes et les confins
occidentaux de son district.
1571 : Originaire de Rovio dans le Tessin, le sculpteur Taddeo
Carlone (1543-1613) s’installe à Gênes, où il se lie avec la
famille Doria. Il réalise entre autres la fontaine de Neptune dans
les jardins de la villa Doria Pamphili.
1572 : L’église San Pietro in Bianchi qui avait été incendiée à
la fin du XIVe siècle est reconstruite sous la direction de
Bernardino Cantone. Le chantier est auto-financé par la vente
d’ateliers et boutiques construits au rez-de-chaussée de
l’édifice. Au-dessus, s’élève l’église à proprement
parler. Elle est accessible par un escalier conduisant à une
terrasse.
De 1575 à 1576 : La guerre civile ravage Gênes. Marchands et
artisans enrichis réclament l’accès à la noblesse et aux
différentes charges, mais le système des inscriptions leur est
désormais interdit. Ils sont soutenus par le popolo qui
revendique entre autres des réductions d’impôt. Les membres de
l’ancienne noblesse obtiennent le soutien de l’Espagne dans la
lutte contre le gouvernement de la république. Mais l’intervention
du pape aboutit en 1576 aux accords de Casale, obtenus entre les deux
partis adverses réunis à Casale Montferrato dans le Piémont. Les
Nouvelles Lois sont publiées le 10 mars et fondent la seconde
constitution génoise, en définissant les différentes instances de
la ville, la répartition entre elles des différents pouvoirs comme
le nombre de leurs représentants. La même année, un décret
officiel instaure une liste de « résidences d’hébergement
public », dite « liste des Rolli ». Elle oblige les propriétaires des
palais de la Strada Nuova à fournir l’hospitalité aux
ambassadeurs et aux princes étrangers au nom de la république de
Gênes. Par la suite, seront ajoutés à cette liste d’autres
somptueux édifices de la ville, notamment les palais de la via
Balbi.
1579 : Les Génois demandent en vain le départ de Finale des troupes
espagnoles.
1580 : Gênes, comme toute l’Italie, est touchée par une terrible
crise, engendrée par une épidémie de peste et les mauvaises
récoltes successives.
1581 : Naissance à Gênes du peintre Bernardo Strozzi, dont la
carrière se poursuivra à Venise à partir de 1631. On lui doit
entre autres le célèbre portrait de Claudio Monteverdi.
1589 : Sous la direction de l’architecte Giuseppe Valeriano,
l’ancienne église Saint-Ambroise, confiée aux jésuites trente-sept ans
plus tôt, et devenue l’église du Gesu, sur la Piazza Mattetoti,
est refaçonnée en style baroque. Le 12 août de la même année
naît à Sarzana le peintre Domenico Fiasella.
1591 : Réalisation à Bruxelles et d’après les dessins du Génois
Luca Cambiaso des tapisseries de la Bataille de Lépante
destinées au Palazzo del Principe.
12 août 1589 : Naissance à Sarzana du peintre Domenico Fiasella,
qui deviendra une figure importante de l’école génoise.
1592 : Sarzana est annexée par la république de Gênes, dont elle
devient l’un des avant-postes à l’est.
1593 : Parution d’Iconologia, recueil écrit par le Pérugin
Cesare Ripa, qui associe symboliquement la Ligurie à une femme
maigre, d’aspect viril et féroce, assise sur un rocher et portant
une veste retroussée avec des broderies dorées.
1603 : Naissance à Gênes du peintre Giovanni Battista Carlone, qui
mènera une partie de sa carrière à Rome avant de revenir dans sa
ville d’origine et d’y décorer l’église du Gesu ainsi que la
basilique Santissima Annunziata del Vastato.
1604 : Le Génois Ambrogio Spinola, généralissime des armées
espagnoles en Flandres, prend Ostende.
1605-1606 : Séjour à Gênes du peintre Pierre Paul Rubens, qui
obtient des commandes prestigieuses de la noblesse locale comme des
jésuites. Il réalise entre autres le portrait équestre de
Giovanni Carlo Doria, aujourd’hui conservé au Palazzo Spinola
di Pelleceria, et La Circoncision ornant les murs de l’église
du Gesu. Après son retour en Flandres, Rubens réalisera pour la
même église Le Miracle de saint Ignace de Loyola. Il fera
aussi paraître un catalogue de dessins représentant en détails les
somptueux palais de la Strada Nuova.
1606-1616 : Construction de la Strada Nuova del Guastati, actuelle
voie Balbi, selon les plans de l’architecte Bartolomeo Bianco. A la
même époque, il est aussi chargé d’agrandir les murailles de la
ville.
1617 : Le poète Ansaldo Ceba identifie le « bon citoyen » au
citoyen génois, dont il vante le sens aigu de la liberté, non sans
critiquer les institutions et l’influence à son sens trop grande
de l’Espagne dans la politique génoise.
1621 : Antoine Van Dyck entame son voyage en Italie, où il restera
six années, particulièrement à Gênes. Une série de portraits de
Van Dyck est encore conservée aujourd’hui au Palazzo Rosso, dont
celui d'Anton Giulio Brignole Sale. Une génération plus tard, ses
œuvres influenceront considérablement le peintre génois Valerio
Castello.
1624 : Naissance à Imperia de Domenico Piola, peintre de l’école
baroque génoise.
Avril-mai 1625 : Début de la guerre contre la Savoie qui conteste à
Gênes la totale possession du fief de Zucarello et veut surtout
limiter l’influence grandissante de l’Espagne dans les relations
internationales. Le 9 avril, les troupes de Charles-Emmanuel,
victorieuses à Voltaggio n’hésitent pas à massacrer les
populations civiles. Le 10 mai, cependant, les Génois reprennent le
dessus au pas de Pertuso.
5 juin 1625 : Prise de Breda, dans les Pays-Bas actuels, après neuf
mois de siège par les Espagnols placés sous le commandement
d’Ambrogio Spinola. La reddition de la cité sera immortalisée dix
ans plus tard dans le célèbre tableau de Vélasquez.
8 juin 1625 : Naissance à Périnaldo, dans la Riviera du Ponant, de
l’astronome Jean-Dominique Cassini, qui sera naturalisé français
sous le règne de Louis XIV.
5 mars 1626 : L’accord de Monçon, passé entre l’Espagne et la
France prévoit une trêve entre Gênes et le duc de Savoie, qui
aboutit à un accord de paix.
1627 : La vieille alliance entre Gênes et l’Espagne, déjà
fragilisée par la situation internationale, est compromise par la
banqueroute espagnole. Gênes fait partie en effet des plus grands
créanciers du royaume d’Espagne.
Avril 1628 : Echec de la conjuration de Vachero, destinée à
délivrer Gênes de la « tyrannie aristocratique ». Ce dernier est
exécuté deux mois plus tard avec trois de ses complices.
1629 : Construction du Palazzo Roca à Chiavari par Bartolomeo
Bianco.
1630 : Naissance à Gênes du sculpteur Giacomo Filippo Parodi, qui
sera aussi père des peintres Giambatttista et Domenico Parodi.
1634-1636
: Construction du collège des Jésuites sur la via Balbi sur les
plans de Bartolomeo Bianco. Il deviendra ensuite le siège de
l’université de Gênes en 1775.
Du déclin à la chute définitive de la république (de 1637 à 1815)
Alors que le doge, pour la première fois dans l’histoire de Gênes,
se pare des insignes royaux, symboles jugés indispensables pour
peser dans le jeu des grandes puissances, Gênes entame en réalité à
partir de 1637 un sûr et lent déclin, inauguré alors par quinze
ans de turbulences politiques. A l’intérieur, conjurations,
conspirations et trahisons se succèdent sur fond de rivalité entre
les membres de la vieille frange aristocratique et les nobles
récemment inscrits. A l’extérieur, la France de Louis XIV mène
en 1684 et 1685 une guerre humiliante contre Gênes. En 1743, le
marquisat de Finale, pourtant vendu à Gênes en 1713, est offert
par Marie-Thérèse d’Autriche à la Savoie. A la merci des grands
Etats européens, incapable de faire entendre sa voix, Gênes se
range alors du côté des Français, mais est écrasée par l’Autriche
en septembre 1746. Malgré le soulèvement héroïque des habitants qui, menés par le jeune Balilla, parviennent à libérer la ville au
terme de trois mois d’occupation, Gênes ne doit qu’à la France
la préservation de son territoire lors de la signature du traité de
paix d’Aix-la-Chapelle. Par ailleurs, impuissante face aux rebelles
corses, elle cède l’île à Louis XV en 1768. Si, en 1794, le
gouvernement génois déjoue la conspiration anti-oligarchique,
inspirée des idéaux révolutionnaires français, il accepte
pourtant trois ans plus tard sans bruit ni résistance la création
par Bonaparte de la nouvelle République ligure démocratique. En
1805, Gênes acceptera aussi docilement son rattachement à l’empire
napoléonien, perçu alors comme un pis-aller. Le traité de Vienne
de 1815 la prive définitivement de son indépendance politique en
l’intégrant contre son gré au royaume de Piémont-Sardaigne.
25 mars 1637 : Consécration de Gênes à la Vierge dans la
cathédrale de San Lorenzo.
Juillet 1637 : Agostino Pallavicino est élu doge et marque ainsi « la victoire des innovateurs ». Ces derniers prônent le retour à
la navigation commerciale, le réarmement, la valorisation des
territoires, dont celui de la Corse, la reprise de la politique de
grands travaux.
19 septembre 1637 : Un décret du Sénat donne officiellement le
titre de royaume à la Corse.
Novembre 1637 : Ce décret justifie en fait avant tout le
couronnement d’Agostino Pallavicino, premier doge de Gênes à
recevoir les insignes royaux. Une gravure du Français Gilles
Rousselet représente l’événement.
1638 : Début de la construction d’un nouveau môle dans le port de
Gênes.
1643-1655 : La famille Balbi confie aux architectes Pier Francesco
Cantone et Michele Moncino la construction d’un nouveau palais,
rebaptisé au XIXe siècle Palazzo Reale.
Décembre 1646 : Une trentaine de représentants du Grand Conseil
(Maggio Consiglio) issus de la vieille frange aristocratique tente
d’empêcher de nouvelles inscriptions au sein de la noblesse
génoise, à travers ce qu’on a appelé la « mobba dei
gentiluomini ». Largement minoritaires, ils ne parviennent pas à
leurs fins.
1647 : Naissance à Imperia de Gregorio de Ferrari, peintre de
l’école génoise. Ses œuvres sont visibles au Palazzo Rosso et au
musée de l’Académie ligure des Beaux-Arts. Il mourra à Gênes en
1726.
8 mai 1648 : Le complot mené par Giovanni Paolo Balbi, l’un des
instigateurs de la « mobba dei gentiluomini », est déjoué.
Celui-ci prévoyait de renverser le gouvernement et de se faire
proclamer archiduc de Gênes, avec l’appui de la France.
1652 : Construction de l’Albergo dei Poveri, sous le patronage
d’Emanuele Brignole. Destiné alors à abriter les malades et les
indigents, il appartient depuis quelques années à l’université
de Gênes.
1654 : Les Génois surprennent à Finale des barques fraudant la
gabelle et les droits de douane de San Giorgio et les confisquent. La
réaction des Espagnols ne se fait pas attendre : les biens et les
revenus génois sont séquestrés sur tout leur territoire.
1656-1657 : La grande peste éclate à nouveau à Gênes. 39 000
personnes, soit la moitié des habitants de la ville, trouvent la
mort.
7 novembre 1659 : Le traité des Pyrénées scelle la paix entre la
France et l’Espagne. Il est suivi en 1660 par le mariage de Louis
XIV et de Marie-Thérèse.
1660 : Nicolas Fouquet envoie Pierre Puget à Gênes chercher des
marbres destinés au château de Vaux, mais le surintendant tombe en
disgrâce l’année suivante. Agé de 38 ans, le sculpteur
français, qui terminait pour son protecteur l’Hercule gaulois,
se fixe alors à Gênes, où il réalise de nombreuses œuvres. On
peut admirer notamment son Saint Sébastien à la basilique di
Santa Maria Assunta in Carignano ou encore le maître-autel en marbre
noir et en bronze de l’église San Siro.
18 septembre 1664 : Naissance à Gênes du sculpteur sur bois baroque
et rococo Anton Maria Marigliano, mort dans la même ville en 1739.
Ses œuvres sont disséminées dans les églises de Gênes et de
Ligurie.
1671-1677 : Réalisation d’un nouveau palais, le Palazzo Rosso, sur
la Strada Nuova par l’architecte Pierantonio Corradi pour la
famille Brignole-Sale.
1672 : Nouvelle guerre contre la Savoie. Mais la conjuration de
Raffaello della Torre, prêt à remettre la ville à Charles-Emmanuel
de Savoie, est déjouée et les troupes ennemies sont mises en déroute
par les Génois, sous le commandement de Per Paolo Restori,
originaire de Bastia.
1679 : Eugenio Durazzio rachète le palais Balbi qui allait devenir
le Palazzo Reale et qu’avait fait construire cinquante ans auparavant la
famille des Balbi. L’architecte Carlo Fontana le transforme alors
considérablement en s’inspirant des palais baroques de Rome, où
il mena l’essentiel de sa carrière.
1679 : Suite à la guerre de Hollande, la paix de Nimègue fait de la
France le grand arbitre en Europe. Elle préserve provisoirement
Gênes des agressions extérieures. En même temps, Gênes maintient
de bonnes relations avec l’Espagne.
1681 : Pierre Puget sculpte la Vierge Carrega, aujourd’hui
conservée dans le musée San Agostino de Gênes. La même année, Louis XIV reçoit officiellement les réclamations du comte Gian
Luigi Fieschi, dont l’ancêtre avait été spolié de ses biens et
privé de ses droits par la république de Gênes. Le roi de France
en profite pour exiger le désarmement d’une partie de la flotte
génoise.
Janvier 1682 : En réaction, Gênes instaure un gouvernement
provisoire doté pour une année de l’autorité suprême, puis
renouvelé.
17 mai 1684 : La flotte française commandée par le marquis de
Seignelay bombarde Gênes. Durant six jours, sont tirés 14 000
boulets qui endommagent le palais ducal et détruisent près de trois cents maisons, dont celle de Christophe Colomb. Elle sera reconstruite au
XVIIIe siècle puis restaurée en 1992 à l’occasion des « colombiades » de Gênes.
12 février 1685 : Le roi de France signe à Versailles des Articles
accordés à la république de Gênes.
15 mai 1685 : Le doge de Gênes lui-même est contraint de se rendre
à Versailles pour accepter officiellement les conditions imposées
par Louis XIV.
1686 : L’affaiblissement du pouvoir politique génois entraîne
l’avènement non loin de Vintimille de la Magnifica Comunita degli
otto luoghi, une entité politique indépendante constituée autour
de la ville de Bordighera. La même année débute à Cervo la
construction de l’église San Giovanni Battista, typique du baroque
ligure, avec une façade concave rehaussée de stucs.
20 août 1713 : Charles VI, empereur des Romains, vend à Gênes
plutôt qu’à la Savoie le marquisat de Finale, position
essentielle dans la Riviera du Ponant.
1715 : Gênes impose à la Corse à la fois son désarmement général
pour mettre fin aux vendettas, mais aussi un nouvel impôt
compensatoire.
De 1728 à 1731 : Montesquieu effectue son « Grand Tour » et confie
avoir une impression déplorable de Gênes, cité avant tout
marchande et dont le doge n’est finalement que le premier
commerçant : « Tout cela rend les esprits les plus bas et les plus
vains du monde », d’autant qu’on observe « dans ce type de
république le plus cruel despotisme ». Comme tous les visiteurs de
l’époque, il est aussi frappé par la pratique des sigisbées,
encourageant les femmes du monde à sortir, non accompagnées de leur
mari, mais plutôt d’un galant chevalier servant, pouvant à
l’occasion faire figure de véritable amant.
1729 : Révolte des Corses qui refusent de payer le supplément
d’impôt imposé par la loi de 1715.
1735 : Le peintre génois Alessandro Magnasco réalise Réception
dans un jardin d’Albaro, conservée aujourd’hui au Palazzo
Bianco.
1738 : La mission diplomatique de Gian Francesco Brignole Sale à
Paris prépare le retournement de la politique extérieure génoise.
Gênes s’appuiera désormais sur la France et non sur l’empereur
pour lutter contre les insurgés corses.
1739 : Les forces françaises soumettent la Corse en moins de trois
semaines, sous le commandement du marquis de Maillebois. La même
année débute la construction de la villa Gavotti, à Albisola
Superiore, dans la Riviera du Ponant. Elle est destinée au dernier
doge de Gênes, Francesco Maria Della Rovere.
13 septembre 1743 : Par le traité de Worms, l’Autriche et
l’Angleterre obtiennent le soutien militaire et diplomatique de
Charles-Emmanuel III de Savoie dans la guerre de succession
d’Autriche. En échange, elles lui offrent le marquisat de Finale,
qui avait été pourtant vendu à la république de Gênes, avant
l’avènement de Marie-Thérèse d’Autriche. Gênes entre alors en
guerre à son tour, aux côtés des Français.
27 septembre 1745 : Gênes est bombardée par la flotte anglaise.
15 juin 1746 : Défaite franco-espagnole à Plaisance face aux
Autrichiens.
6 septembre 1746 : Capitulation de Gênes occupée désormais par les
troupes autrichiennes de Botta Adorno. Marie-Thérèse d’Autriche
exige un tribut de trois millions d’écus d’argent et contribue
ainsi à la ruine de la banque Saint-Georges.
5 décembre 1746 : Révolte populaire des Génois déclenchée à
partir d’un banal jet de pierre lancé sur les Autrichiens par la
jeune Giovan Battista Perasso, dit « Balilla ». En cinq jours, Gênes est
libérée. Un nouveau gouvernement se met en place, qui, pour la
première fois dans l’histoire de Gênes, doit tenir compte du
popolo dans son entier, c’est-à-dire de la
masse des non-inscrits.
17 janvier 1747 : Une rumeur, selon laquelle les nobles opposés au
nouveau régime envisagent le retour des Autrichiens, entraîne
l’attaque du Palazzo ducale dont l’armurerie est dévalisée. Au
même moment, le maréchal de Belle-Isle repousse les Autrichiens et
les Piémontais au-delà du Var.
1748 : A la fin de la guerre, Gênes déplore pourtant la perte de
la Riviera du Ponant, occupée par les Sardes, comme celles de
l’Oltregiogo et d’une partie de la Riviera du Levant, aux mains
des Autrichiens. Or, lors de la paix d’Aix-Chapelle, signée le 18
octobre, la France intervient en faveur de la république de Gênes,
qui, reconnue indépendante, conserve son ancien domaine comme la
Corse. Celle-ci est pourtant dans sa grande majorité aux mains des
chefs rebelles.
1751 : Fondation de l’Académie des Beaux-Arts de Gênes.
1756 : Premier traité de Compiègne entre Gênes et la France :
Ajaccio, Calvi et Saint-Florent sont défendues par des garnisons
françaises.
1763 : Famine à Gênes comme dans toute la péninsule italienne.
1764 : Second traité de Compiègne entre Gênes et la France qui
s’engage à défendre aussi Bastia et Algajola. La même année, l’aventurier et littérateur français Ange Goudar publie L’Espion
chinois, conçu comme un pastiche des Lettres persanes. Il
y livre une description féroce de Gênes : « La religion de
l’intérêt passe devant celle du Christ. Les grands comme les
petits sont attachés à ce dogme. La foi là-dessus est universelle.
Il n’y a point d’hérétiques sur le culte des richesses. Tout
est sujet d’épargne ou, pour mieux dire, d’avarice. Il est
défendu aux chiens de vivre à Gênes ; car ce gouvernement ne veut
point de bouches inutiles, et les chiens ne gagnent point d’argent. »
11 février 1768 : Naissance à Gênes de l’architecte néoclassique
Carlo Barabino, qui transformera considérablement la ville au XIXe
siècle.
5 mai 1768 : Par le traité de Versailles, la Corse est cédée à la
France en paiement de la dette génoise de deux millions de livres.
La Corse devient ainsi française un an avant la naissance de
Napoléon à Ajaccio.
1773 : Suppression de la compagnie de Jésus.
De 1778 à 1783 : Suite à un incendie, la construction d’une
nouvelle façade pour le Palazzo ducale est confiée à l’architecte
lombard néoclassique Simone Cantoni assisté de son frère Gaetano.
Ils y aménageront aussi de nouveaux salons.
1779 : Création à Gênes d’une chaire de chimie.
1780 : Le peintre Giovanni David, originaire de Cabella Ligure, et
qui fut actif dans de nombreux pays européens, décore le salon du
Grand Conseil du Palazzo ducale à Gênes. Il mourra dans cette ville
dix ans plus tard.
1782 : Naissance de Niccolo Paganini à Gênes.
1787 : Crise entre le Piémont et la république à propos du Ponant.
Les Piémontais modifient en effet, au désavantage de Gênes, les
limites de la communauté de Pornassio.
30 novembre 1789 : En France, un décret de l’Assemblée
constituante déclare officiellement la Corse comme « partie de
l’Empire français ».
1792 : Début de la guerre de la première coalition contre la France
révolutionnaire. Gênes préserve sa neutralité et se préoccupe
surtout de défendre ses propres escales.
Début 1794 : Le gouvernement génois déjoue la conspiration dite « anti-oligarchique ».
Printemps 1796 : Bonaparte part à la conquête de l’Italie depuis
la Riviera du Ponant.
9 octobre 1796 (18 Vendémiaire an V) : Gênes, qui partage alors
avec la France deux ennemis communs, l’Autriche et la Sardaigne,
conclut finalement une convention avec le Directoire.
6 juin 1797 : Convoqués à Milan par Bonaparte, les représentants
génois signent la convention de Monbello qui marque la création de
la nouvelle République ligure démocratique, en place de la
république oligarchique de Gênes. C’est la fin de l’ancien
régime génois, dont on détruit ou met à bas les principaux
symboles, ainsi la chaise à porteur du doge, le livre d’or de la
noblesse ou encore la monumentale statue d’Andrea Doria. Le pouvoir
législatif est confié à deux conseils respectivement de trois cents et de
cent cinquante membres. Un sénat de douze membres, présidé par un doge,
représente le pouvoir exécutif. Le doge et les sénateurs sont
nommés par les conseils. La même année, le Banco di San Gorgio est « obligé de donner tout son argent comptant comme subside à celle
de la République ».
Septembre 1797 : Ce n’est pas dans la cité même de Gênes, que
l’opposition au régime est la plus virulente, mais plutôt dans
les vallées et les Apennins, où la contre-révolution est
férocement réprimée par l’armée française. La même année
sont supprimées les anciennes corporations de métiers.
Juillet 1798 : Mise en place d’un plan d’instruction publique.
7 décembre 1799 : A l’imitation du 18 Brumaire, coup d’Etat du
général Miollis qui procède à une centaine d’arrestations parmi
les membres du gouvernement et en fait fusiller une vingtaine. Le
gouvernement représentatif est aboli et la ville passe sous contrôle
militaire français. Une commission, composée de neuf membres, est
chargée de rédiger une nouvelle constitution.
9 février 1800 (20 Pluviôse an VI) : Arrivée à Gênes d’André
Masséna, commandant en chef de l’armée d’Italie. Il exige 2
millions à la ville pour subventionner la campagne militaire, ce qui
attise la rancœur de la population face à l’occupant français.
Son impopularité le conduit à faire passer le nombre de
représentants de la commission de neuf à quinze afin de disposer d’une
majorité favorable.
Avril 1800 : Les troupes autrichiennes assiègent Gênes.
6 juin 1800 : Masséna capitule et quitte la ville avec ses 18 000
hommes. Les Autrichiens créent à Gênes un gouvernement éphémère
: la Régence impériale et provisoire. Dans la ville, la population
civile est aussi en proie à la famine et aux épidémies.
14 juin 1800 : Victoire française de Marengo ouvrant à nouveau aux
Français les portes de l’Italie.
24 juin 1800 : Entrée dans Gênes de l’armée française
commandée par le général Miollis. Un tableau de Jean-François Hue
évoque cet épisode.
1801 : En onze ans, Gênes est passée de 110 000 habitants à 85 000.
2 juillet 1801 : Dans une lettre à Talleyrand, Bonaparte s’oppose
pour des raisons politiques au changement de nom des deux Rivières : « C’est sans inconvénient que l’on a fait revivre les mots des
Rivières ; s’ils sont divisés entre eux, ils en seront d’autant
plus faibles contre la capitale qui, dans les circonstances où se
trouve Gênes, est l’intérêt majeur. »
16 octobre 1801 (25 Vendémiaire an X) : La constitution ligurienne
est achevée. Mais la nouvelle république n’est libre que sur le
papier. En effet, le doge et les sénateurs qui disposent
officiellement du pouvoir exécutif sont nommés par Bonaparte, alors
Premier Consul. Et ce dernier s’oppose à la création d’une
seule république réunissant la Cisalpine, la Ligurie et le Piémont,
pourtant prônée par les partisans génois des idéaux
révolutionnaires.
13 avril 1802 : Bonaparte promulgue officiellement la constitution à
Gênes. Le proconsul Jean-François Aimé Dejean est remplacé par
l’ancien conventionnel régicide corse, Christophe Saliceti.
20 mai 1805 : Talleyrand évoque « l’inutilité de l’indépendance
de Gênes et la nécessité de son rattachement à l’empire ».
25 mai 1805 : Un projet de réunion à la France est proposé au
sénat et voté en l’absence du doge et d’une partie des
sénateurs, alors à Milan. Parmi ceux qui sont demeurés sur place,
Onofrio Scassi écrit : « Notre gouvernement n’est qu’une
larve, [autant] laisser tomber le masque et nous réunir à une
nation qui est la seule capable d’offrir la prospérité au pays. » Les représentants du peuple ligurien sont à leur tour consultés et
approuvent majoritairement le rattachement à la France. Sans
véritable résistance, la république est intégrée au nouvel
empire.
6 juin 1805 : Un décret est promulgué indiquant la division en
trois départements de la Ligurie : Montenotte (Riviera du Ponant),
Gênes, les Apennins (Riviera du Levant).
22 juin 1805 : Naissance à Gênes de Giuseppe Mazzini, père du
Risorgimento.
Du 30 juin au 5 juillet 1805 : Napoléon réside à Gênes dans le
palais d’Andrea Doria, dont il fait relever la statue abattue des
années auparavant par les jacobins génois. Le 4 juillet, il ordonne
par décret impérial la disparition officielle et définitive du
Banco di San Gorgio.
1809 : Gênes ne compte plus maintenant que 76 000 habitants.
1813 : Le préfet de Gênes constate un « accroissement progressif
de la population des hospices », causé par la « misère qui, du
fait de la stagnation du commerce, n’a fait que croître chaque
année ».
Février 1814 : Les troupes autrichiennes franchissent les Apennins.
Le sous-préfet de Savone, Giorgio Gallesio tente de se replier vers
Chiavari, mais en est empêché par une foule de paysans favorables
aux Autrichiens.
27 mars 1814 : Les Anglais débarquent d’abord à la Spezia puis
font route vers Gênes.
2 avril 1814 : Début du siège de Gênes sous le commandement de
Lord William Bentinck.
18 avril 1814 : Gênes finit par capituler. Les Anglais font miroiter
aux Génois leur indépendance, rétablissent la constitution de 1797
et instaurent un gouvernement provisoire, dont la présidence est
confiée à Girolamo Serra, réputé modéré. La statue de Napoléon
est abattue.
1815
: Lors du congrès de Vienne, Gênes et la Ligurie sont intégrées
dans le royaume de Piémont-Sardaigne sous le nom de duché de Gênes.
Le secrétaire d’Antonio Brignole Sale écrit alors : « La
sérénissime république de Gênes a au final péri sous les coups
mortels de l’ambition et de la révoltante injustice des monarques
d’Europe. »
De la sujétion au Piémont à l'unité italienne (de 1815 à 1915)
L’intégration forcée au royaume de Piémont-Sardaigne favorise à
Gênes le développement des premières aspirations nationales et
l’affirmation grandissante d’un courant intellectuel acquis aux
idées nouvelles. Jusqu’au milieu du siècle, Gênes traverse une
période de stagnation économique, mais bénéficie pourtant dans
son tissu urbain d’aménagements importants confiés à
l’architecte Carlo Barabino, avec, notamment, la transformation du
Palazzo Durazzo en Palazzo Reale, la construction du théâtre Carlo
Felice, l’aménagement des jardins de l’Acquasola. Ces
embellissements prestigieux marquent l’attachement des nouveaux
souverains à la ville, érigée aussi au rang de premier port du
royaume de Piémont-Sardaigne. Mais Gênes, ville de naissance de
Giuseppe Mazzini, futur artisan de l’unité italienne, réclame à
cor et à cri réformes libérales et changement de régime.
L’invasion autrichienne dans la péninsule exacerbe son
mécontentement, d’autant que l’armée piémontaise est
lamentablement battue. Le ressentiment contre le gouvernement de Turin
s’estompera cependant à partir de 1850, d’autant que Gênes et
la Ligurie sont finalement intégrées au royaume d’Italie en 1861.
A partir de 1871, Gênes, agrandie une première fois, bénéficie
aussi de nouvelles infrastructures. Son port aménagé et modernisé
devient l’un des premiers au monde et favorise l’accroissement
du trafic maritime, notamment vers l’Amérique. Ce renouveau
marchand et industriel est pourtant contrebalancé au début du XXe
siècle par la gronde des mouvements ouvriers. En décembre 1900, la
grève générale du port de Gênes aura ainsi des retombées
politiques dans toute l’Italie.
1816 : Retour des jésuites à Gênes qui s’installent au palais
Tursi.
1817 : Aux yeux du duc de Dalberg, ambassadeur français à Turin : « Gênes est un superbe diamant que les joailliers piémontais ne
savent pas enchâsser. »
1818 : Carlo Barabino est nommé architecte officiel de la commune de
Gênes dont l’agencement des rues et des grands axes routiers est
considérablement transformé, avec, notamment, la construction de
l’actuelle via Antonio Gramsci, puis celle de la via Felice.
1820 : Peu à peu, Gênes devient l’épicentre de la marine du
royaume de Piémont-Sardaigne. Dans ce contexte, l’ancienne
tradition « privée » génoise est abandonnée.
1821 : Carlo Barabino conçoit la « promenade » des jardins de
l’Acquasola et donne une nouvelle façade à l’église San Siro.
Le 12 mars, Carlo Felice devient à son tour, après l’abdication
de Vittorio Emmanuele roi de Sardaigne, prince de Piémont et duc de
Savoie.
1822 : Le poète lord Byron réside dans la villa Saluzzo
Mongiardino, à Albaro, l’une des communes rattachées à la ville
de Gênes en 1926.
8 juillet 1822 : Son compatriote, le poète Percy Bysshe Shelley meurt
noyé au large de La Spezia à l’âge de 29 ans. Il séjournait
fréquemment dans la région avec sa femme Mary, auteur du célèbre
Frankenstein.
1823 : Rebaptisé Palazzo Reale, le Palazzo Balbi-Durasso devient la
résidence officielle à Gênes de la maison royale de Savoie. Il
abrite aujourd’hui les collections de la Galerie nationale.
1825 : Un observateur britannique constate que « le port et la cité
de Gênes présentent un cadre d’activité, d’affaires et de
gains comme on n’en trouve en aucun autre endroit d’Italie ». La
même année paraît pour la première fois le Corriere mercantile,
organe de presse du nouveau parti modéré, le parti constitutionnel.
Carlo Barabino enfin se voit confier la construction de l’Académie
ligure.
7 avril 1828 : Inauguration du théâtre Carlo Felice, réalisé lui
aussi par Carlo Barabino.
21 décembre 1830 : Giusseppe Mazzini est dénoncé comme membre des
Carbonari et emprisonné dans la forteresse de Priamar à Savone,
puis contraint à l’exil.
1832 : Mazzini crée à Marseille la Jeune Italie, afin d’œuvrer à
la constitution d’une nation « unitaire, indépendante, libre et
républicaine ». Il est alors condamné à mort par contumace. Il se
réfugiera ensuite en Suisse, à Paris et en Angleterre.
Juillet 1830 : En France, épisode révolutionnaire des Trois
Glorieuses, qui influencera l’Europe et particulièrement
l’Italie.
27 avril 1831 : Avènement de Charles-Albert Ier de Savoie.
1833 : L’écrivain danois Hans Christian Andersen séjourne à
Sestri Levante dans la Riviera du Levant et donne son nom à la baie
des Fables.
3 septembre 1835 : Mort à Gênes de l’architecte Carlo Barabino.
1835-1837 : Epidémie de choléra.
1837-1846 : Michele Canzio, déjà célèbre pour avoir décoré le
théâtre Carlo Felice, autour de 1820, aménage les jardins
anglais de la villa Durazzo Pallavicini.
1838 : Giacomo Michele Cevasco fait paraître sa Statistique de la
ville de Gênes et y recense 2 800 mendiants et vagabonds sur une
population inférieure à 100 000 habitants.
Juin 1842 : Fêtes organisées dans la cité pour les noces du duc de
Savoie, futur roi Victor-Emmanuel II, avec Marie Adélaïde de
Habsbourg.
1842 : L’architecte Ippolito Cremona modifie la façade de l’église
Santa Maria delle Vigne.
16 mars 1844 : Le roi autorise par décret la fondation d’une
banque publique d’escompte et de dépôts sous le nom de Banco
di Genova. Si elle fusionne rapidement avec la Banca di Torino, sa
création marque le retour de Gênes sur la scène financière
internationale.
1844 : Construction en style néoclassique du cimetière di
Staglieno, au nord-ouest de la ville. Giuseppe Mazzini ou encore
Constance Mary Lloyd, épouse d’Oscar Wilde, y sont enterrés.
1844-1845 : Nouvelle épidémie de choléra.
1846 : Gênes célèbre en grande pompe le centenaire de l’expulsion
des Autrichiens. La figure de Balilla, jeune héros de 17 ans,
est redécouverte à cette occasion et célébrée par le poète
génois Goffredo Mameli. Dans Fratelli d’Italia, devenu
depuis l’hymne national italien, il rappelle ainsi que « les
enfants d’Italie s’appellent Balilla ». La même année, on
érige sur la piazza dell’Acquaverde un monument à Christophe
Colomb.
1847 : La colère gronde dans l’opinion publique qui réclame à
la fois réformes, changement de régime et liberté de la presse.
Afin de soutenir ces revendications libérales, tout en les modérant,
le marquis Giorgio Doria fonde le Comitato dell’Ordine et vise à
établir un dialogue pacifique avec le gouvernement de Turin. Des
manifestations sont organisées à partir du 8 septembre. L’une
d’elles particulièrement grandiose réunit 32 000 Génois, qui
acclament à la fois le pape, Charles-Albert ou Balilla. La même
année, Federico Alizori fait paraître un Guide artistique de la
cité de Gênes, évoquant l’état déplorable du patrimoine
architectural génois.
Janvier 1848 : En soutien à Milan, Gênes est le théâtre de
violentes manifestations contre l’occupation autrichienne en
Italie.
Février 1848 : Les jésuites, jugés trop conservateurs, sont la
cible d’une insurrection génoise, et sont expulsés de leur
collège du Palazzo Tursi et du couvent Sant’Ambrogio. A leur place
s’y installent, dans la nuit du 29 février au 1er mars, une garde
civique, nouvellement constituée, avec, à sa tête, des aristocrates,
ainsi Giorgio Doria, Lorenzo Pareto, ou encore Vincenzo Ricci.
2 mars 1848 : Le roi Charles-Albert ordonne à son tour l’expulsion
officielle des jésuites, et cautionne ainsi les agissements de la
nouvelle garde civique. Ses principaux représentants sont pourtant
convaincus que la politique savoyarde est opposée aux intérêts
génois.
24 mars 1848 : Charles-Albert entre officiellement en guerre contre
l’Autriche.
3 avril 1848 : Le Comitato dell’Ordine devient le Circolo Nazionale.
Du 23 au 27 juillet 1848 : Bataille de Custoza près de Vérone qui
voit la défaite des Piémontais contre les Autrichiens.
9 août 1848 : Signature de l’armistice austro-sarde. Peu après,
le républicain Filippo de Boni devient président du Circolo
Nazionale.
Octobre 1848 : Instauration d’un système électoral censitaire
permettant de désigner conseils municipaux et députations
provinciales.
12 mars 1849 : Charles-Albert décide la poursuite des hostilités
contre l’Autriche.
23 mars 1849 : La bataille de Novare se solde par la défaite totale
de l’armée piémontaise.
27 mars 1849 : Insurrection à Gênes des partisans de la poursuite
de la guerre avec l’Autriche. Elle est réprimée dans le sang par
le général La Marmora.
6 août 1849 : Signature d’un traité de paix avec l’Autriche.
1855 : Inauguration de la bourse de Gênes.
1857 : Echec à Gênes de la conspiration soutenue par Mazzini. Ce
dernier, à la tête du Partito d’Azione, se réfugie un temps dans
la clandestinité. Il est condamné une seconde fois à mort par
contumace. Le 4 juillet, la base de la marine militaire du royaume de
Sardaigne est déplacée de Gênes à La Spezia, mais Cavour concède
d’importantes contreparties économiques. Le 22 novembre, est
fondée la Société ligure de l’histoire de la patrie.
24 mars 1860 : Cession de Nice à la France.
5 mai 1860 : L’expédition des Mille, menée par Garibaldi, part de
Quarto dans la banlieue génoise.
17 mars 1861 : Proclamation du royaume d’Italie, auquel sont
rattachés Gênes et la Ligurie.
1862 : Le marquis Gatano Gropallo aménage à Gênes le passage Anita-Garibaldi, magnifique promenade de deux kilomètres en front de mer, à Nervi, en
dehors du centre de Gênes.
1862 : Le plan d’agrandissement de Gênes, dans la vallée, entre
les cols de San Rocchino et Santa Maria della Sanita, est
officiellement approuvé.
1865 : Adoption du projet d’agrandissement de Gênes qui avait été
confié à l’ingénieur Adolfo Parodi.
1866 : Le baron Andrea Podesta, représentant à la fois de la
laïcité et du libéralisme modéré, devient pour la première fois
maire de Gênes. On lui doit les grands aménagements du XIXe siècle.
1866 : Vittorio Emmanuele II lègue à la ville de Gênes la
collection de son fils, le prince Otton Eugène de Savoie, qui
constituera le noyau de la future Galleria d’arte moderna,
installée dans la villa Serra de Nervi.
1866-1867 : Epidémie de choléra.
1er mai 1867 : Thomas Hanbury, un négociant anglais ayant fait
fortune en Inde, achète le domaine situé sur le cap de la Mortola,
près de Vintimille, qui deviendra le célèbre jardin botanique
Hanbury, grâce à son frère Thomas Hanbury et l’épouse de ce
dernier lady Dorothy.
1868 : L’armateur génois Raffaele Rubattino, après avoir fondé la
Compagnie transatlantique de Gênes et bénéficié de subventions
pour assurer les liaisons maritimes entre Gênes, New York et Rio de
Janeiro, obtient un prêt important pour la création d’une ligne
vers l’Egypte.
1870 : Ouverture d’une ligne maritime Gênes-Bombay. A Voltri,
aujourd’hui faubourg du Grand Gênes, la duchesse de Galliera
acquiert la villa Brignole-Sale datée des XVIIe et XVIIIe siècles.
Elle y fait aménager un vaste jardin à l’anglaise s’étendant
sur 32 hectares.
10 mars 1872 : Mort à Pise de Mazzini, dont la ville de Gênes
célèbre chaque année l’anniversaire.
1873 : Epidémie de choléra.
1er janvier 1874 : A la suite du décret royal de Victor-Emmanuel II
du 26 octobre 1873, six communes contiguës sont intégrées à la
cité de Gênes. On construit par la suite la Piazza de Ferrari ornée
d’une grande fontaine pour faciliter la circulation entre la
vieille-ville et la partie ouest de la ville. Les travaux
d’agrandissement du port de Gênes débutent la même année. Il ne
tarde pas à devenir l’un des mieux appareillés au monde.
1882 : Le séjour à Gênes de Nietzsche lui inspirera ensuite dans
le Gai Savoir : « J’ai regardé durant un bon moment cette
ville, ses maisons de campagne et ses jardins d’agrément et le
large cercle de ses collines et de ses pentes habitées ; enfin, je
finis par me dire : je vois des visages de générations passées – cette contrée est couverte par les images d’hommes intrépides et
souverains. Ils ont vécu et ils ont voulu prolonger leur vie –, c’est
ce qu’ils me disent avec leurs maisons, construites et ornées pour
des siècles, et non pour l’heure fugitive. »
1884 : Monet réalise deux vues de Bordighera où il séjourne,
localité en bord de mer dans la Riviera du Ponant, près de San Remo.
Il peint aussi à Dolceaqua : « L’endroit est superbe. Il y a un
pont qui est un bijou de légèreté. »
1887 : Un séisme détruit le château des Doria à Dolceaqua et le
bourg de Bussana Vechia. Ce dernier sera restauré à l’identique
dans les années soixante par une colonie d’artistes venus s’y
installer.
1890 : Création du journal La Voce del Popolo.
15 août 1892 : Au congrès de Gênes, le Parti ouvrier italien créé
en 1882 se transforme en Parti des travailleurs italiens qui
deviendra, en 1895, le Parti socialiste italien.
1894 : Création du Parti socialiste ligure.
1896 : Francesco Pozzo, ouvertement catholique, devient maire de
Gênes.
11 août 1898 : Accident du train Gênes-Turin lié à l’utilisation
de charbon défectueux.
19 décembre 1900 : Le préfet de Gênes, Camillo Garroni, sous la
pression des entrepreneurs portuaires et des négociants, ferme la
Chambre du travail de Gênes, pour des raisons d’ordre public.
20 décembre 1900 : Annonce d’une grève générale du port qui a
un impact dans toute l’Italie. Elle touche bientôt les quartiers
de Sampierdarena, Cornigliano et Sestro Ponente. Le gouvernement cède
deux jours plus tard. Par la suite est constituée, à Gênes, la
nouvelle Fédération des armateurs Italiens (Federazione Armatori
Italiani).
1901 : La grève de Gênes ouvre la voie au gouvernement de gauche
Zanardelli qui demeure au pouvoir jusqu’en 1903 et vote
d’importantes lois sociales sur le travail des femmes et des
enfants, le repos hebdomadaire ou encore le contrat de travail.
1904 : Construction à San Remo dans la Riviera du Ponant du casino
en style Art nouveau par l’architecte Eugenio Ferret.
1905 : Création à Gênes de l’Ilva, société d’exploitation
des minerais de fer de l’île d’Elbe.
1906 : Dans les remparts de la ville de Gênes, construction, au
niveau de la Piazza Manin, du castello Mackenzie sous la direction de
l’architecte Art nouveau Gino Coppede.
1910 : Giacomo Grasso devient maire de Gênes.
1913-1914
: L’écrivain D. H. Lawrence, auteur de L’Amant de lady
Chatterley, séjourne avec sa femme dans le petit village de
Fiascherino dans la Riviera du Levant, près de La Spezia.
De la première guerre mondiale à nos jours
L’Italie entre en guerre en 1915, avec le soutien de la classe
politique génoise, favorable dans son ensemble à
l’interventionnisme. Mais, déçue par le traité de Versailles, qui
ne la traite pas en pays vainqueur et ne donne suite à aucune de ses
revendications territoriales, elle laisse alors libre cours à la
montée du fascisme. Au moment de fonder son mouvement, Mussolini
s’appuiera d’ailleurs en partie sur Gênes, considérée depuis la
fin du XIXe siècle comme un centre industriel et portuaire
incontournable, mais il devra aussi compter avec une opposition non
négligeable. C’est cependant sous le régime fasciste que sera
mise en place l’ambitieuse « Grande Gênes », intégrant
désormais administrativement les communes limitrophes. Malgré les
bombardements anglais de 1941, visant la destruction des
infrastructures, et les tentatives de sabotage, en 1944, de l’armée
allemande en déroute, Gênes retrouvera dans la seconde moitié du
XXe siècle et jusqu’à nos jours, sa place de premier port italien.
Par ailleurs, elle s’engagera dès l’après-guerre dans une
politique de revalorisation de son patrimoine, couronnée en 2006 par
l’inscription au patrimoine mondial de l’humanité des Strade
Nuove et des palais des Rolli. Fière de son passé, mais capable
aussi d’encourager la création contemporaine, Gênes confia aussi
à l’architecte Renzo Piano la direction de nombreux chantiers de
1992 à nos jours.
1915 : Entrée en guerre de l’Italie.
1919 : Le port de Gênes est considérablement agrandi. La même
année, en souvenir des hommes et des femmes de lettres ayant
séjourné dans la Riviera du Levant, et en particulier dans les Cinq
Terres, le dramaturge italien Sem Benelli donne son nom au golfe des
Poètes.
1920 : Agitations ouvrières en Italie et aussi à Gênes, dont les
usines d’industries mécanique et métallurgique sont occupées à
plusieurs reprises. Le parti populaire est alors le premier parti de
Ligurie, mais, au mois de novembre, c’est Federico Ricci, libéral
et conservateur, qui remporte la mairie de Gênes. La même année
débute la construction de l’église orthodoxe de San Remo, station
balnéaire de la Riviera du Ponant alors particulièrement prisée
par les Russes.
Mars 1922 : Mussolini crée à Gênes la Corporation nationale de la
marine marchande, étendue ensuite à d’autres ports.
30 juillet 1922 : Le journal Il Lavoro de Gênes annonce de manière
anticipée que la Fédération des syndicats italiens s’apprête à
proclamer la grève générale, mais celle-ci se solde par un échec
le 3 août et, dès le 14 août, la gestion du port de Gênes est
confiée à l’amiral Giulio Inganni. Or, ce dernier revient sur
toutes les concessions faites auparavant aux travailleurs du port.
1923 : Les deux communes Oneglia et Porto Maurizio sont regroupées
par Mussolini pour former celle d’Imperia, chef-lieu de la province
ligure du même nom.
Printemps 1924 : Le maire de Gênes Federico Ricci refuse d’attribuer
à Mussolini la citoyenneté honoraire en reconnaissance de son
intervention en faveur de l’intégration de Fiume à l'Italie.
Les fascistes présents dans sa majorité démissionnent et entraînent
la dissolution du conseil communal.
A partir de janvier 1926 : Formation de la Grande Gênes, une cité
qui s’étend désormais de chaque côté du golfe qui porte son nom
et regroupe, depuis Nervi jusqu’à Voltri, vingt nouvelles communes,
transformées en autant de quartiers périphériques.
1927 : Finale Ligure se compose de trois localités, Pia, Marina et
Borgo, réunies en 1927 pour former l’une des principales villes de
la Riviera du Ponant. La même année, le plus grand paquebot italien
et génois de l’époque, « Principessa Mafalda », fait naufrage au
large du Brésil, le 25 octobre.
1929 : L’une des répercussions de la crise internationale est la
réduction de l’activité de construction navale à Gênes.
A partir de 1930 : Mussolini procède à de nombreux réaménagements
dans le centre historique de Gênes.
14 septembre 1937 : Naissance à Gênes de l’architecte Renzo
Piano.
Juin 1940 : Gênes subit un premier bombardement par la marine
française dans le cadre de l’opération Vado, visant les
installations pétrolières de Vado ligure.
9 février 1941 : Gênes est bombardée une heure et demie, cette fois
par la flotte britannique, dont la mission est de détruire le port
de Gênes, de ravager ses installations industrielles et d’attaquer
la base navale de La Spezia. La ville déplore alors 144 morts,
principalement des civils.
25 juillet 1943 : Le roi Vittorio Emanuele réclame la démission de
Mussolini et le remplace par le maréchal Badoglio. A Gênes, comme
dans les autres villes du Nord de l’Italie, on manifeste pour la
fin de la guerre.
Septembre 1943 : Les troupes allemandes occupent La Spezia, puis
Savone et Gênes. Le théâtre San Felice est en grande partie
détruit par des bombardements. Il ne conservera que quelques pans de
sa façade.
Février 1944 : La nouvelle République sociale italienne proclame la
levée en masse des jeunes en âge de faire leur service militaire.
Se développe alors le mouvement partisan, dominé par les
communistes et comptant 30 000 membres au printemps 1944. La Ligurie
et Gênes font partie de la zone IV.
24 avril 1944 : Insurrection générale à Gênes, pilotée par le
comité de libération ligure contre les troupes de Gunther von
Meinhold.
25 avril 1944 : Les Allemands acceptent la reddition de la ville,
mais tentent le lendemain et le surlendemain de détruire les
infrastructures portuaires et industrielles. Les Génois, décorés
par la suite de la médaille d’or de la valeur militaire, les en
empêchent.
4 juin 1944 : Chute de Rome.
14 mai 1946 : Souvent présenté comme le dernier doge de Gênes,
Giuseppe Siri devient archevêque.
Décembre 1946 : Election à la mairie de Gênes du communiste
Giovanni Tarello, auquel succédera deux ans plus tard un autre
communiste, Gelasio Adamoli, avant le socialiste Vanuccio Faralli.
14 juillet 1948 : Grève générale en Italie, notamment à Gênes, à
la suite de l’attentat commis à Rome contre le chef du Parti
communiste italien, Palmiro Togliatti. Le 16 juillet, le pays entier
déplore seize morts et plusieurs centaines de blessés.
1950 : Découverte de la grotte de Toirano entre Albenga et Pietra
Ligure. A Gênes, le Palazzo Bianco et le Palazzo Rosso sont
transformés en deux musées modernes.
1951 : Inauguration du musée d’art contemporain à la villa Croce,
au sud de la ville de Gênes, dans le quartier résidentiel de
Carignano.
1951 : Les démocrates-chrétiens remportent les élections. Le
centriste Vittorio Pertusio devient maire jusqu’en 1965. Cette
période est caractérisée sur le plan culturel par l’aménagement
de prestigieux musées. Dans le centre historique de Gênes, le
Palazzo Bianco et le Palazzo Rosso sont ainsi transformés en deux
musées modernes. Dans le quartier résidentiel de Carignano est
inauguré, au sud de la ville, un musée d’art contemporain à la
villa Croce. Au niveau des infrastructures, de nouveaux réseaux
routiers sont aménagés.
1954 : Une statue en bronze de
Guido Galletti appelée « Le
Christ des Abysses » est
descendue au large de San Fruttuoso, dans la péninsule de Portofino.
Elle symbolise en effet l’attachement des Ligures à la mer.
1958 : Les Spinola offrent leur
palais de la Piazza Pelliceria à l’Etat, afin qu’il soit
transformé en Galerie nationale.
1960-1970 : Trois figures politiques dominent Gênes : Angelo Costa,
libéral, Paolo Emilio Taviani, démocrate-chrétien, et Giuseppe
Siri.
1960 : Lady Doroty vend à l’Etat le jardin botanique Hanbury,
dévasté par les bombardements de la seconde guerre mondiale. La
même année, une manifestation communiste contre la tenue à Gênes
du congrès du MSI, parti d’extrême-droite, dégénère en émeute.
21 octobre 1962 : Inauguration de l’aéroport de Gênes, jour
anniversaire de la découverte de l’Amérique. Il prendra le nom de
Christophe-Colomb. A la même époque, Gênes perd son statut de
premier site de construction navale dans la péninsule.
18 avril 1974 : Gianni Agnelli, patron de Fiat, accède à la
présidence de la Cofindustria. Le même jour, les brigades rouges
enlèvent à Gênes le substitut du procureur de la République,
Mario Sossi, et le séquestrent pendant trente-cinq jours.
8 juin 1976 : Assassinat à Gênes du procureur général Francesco
Coco et de deux membres de son escorte par un commando des Brigades
rouges.
21 juin 1978 : Assassinat à Gênes d’un fonctionnaire de
l’anti-terrorisme, Antonio Esposito.
1979 : Le 24 janvier, le syndicaliste Guido Rossa est assassiné
à Gênes par les Brigades rouges après avoir permis l’arrestation
d’un de leurs membres. La même année, la mairie de Gênes rachète
à Nervi le musée de la collection Frugone, installé dans
l’ancienne villa Grimaldi Fassio et abritant des collections d’art
figuratif des XIXe et des XXe siècles.
1980-1983 : Plusieurs scandales de corruption éclaboussent
d’importants hommes politiques génois, notamment le sénateur
Franco Fossa, le président de région Alberto Teardo, ou encore le
maire de Gênes Claudio Burlando. Des arrestations ont lieu.
1986 : Le taux de fécondité italien est tombé à 1,3 par femme en
âge de procréer – le plus bas des pays européens – et à 0,9 pour
la Ligurie.
1989 : Mort du cardinal Siri, deux ans après la fin de son
épiscopat. Celui-ci avait duré quarante-et-un ans.
1991 : Inauguration du nouveau théâtre Carlo Felice qui ne
conserve que quelques éléments de sa façade originelle après les
bombardements de la seconde guerre mondiale. Sa construction a été
confiée à Ignazio Gardella, Aldo Rossi et Fabio Reinhardt. Il se
caractérise à l’extérieur par une imposante tour carrée percée
de petites fenêtres.
1992 : Fête des « Colombiades » à l’occasion du cinq-centième anniversaire de la découverte de l’Amérique par Christophe
Colomb. Le port est totalement rénové sous la direction de
l’architecte Renzo Piano qui construit alors l’aquarium, ainsi
qu’un ascenseur panoramique, appelé le Bigo. Les anciens
entrepôts de coton sont, quant à eux, convertis en cinéma et centre
d’exposition. On engage aussi une vaste campagne de restauration du
Palazzo Ducale. La même année est enfin construite la Tour surnommée « il Matitone », c’est-à-dire « le gros crayon », en référence à
sa forme octogonale, elle-même inspirée du clocher de l’église
de San Donato.
1997 : Les Cinq Terres, regroupant cinq villages du littoral :
Monterosse al Mare, Vernazza, Corniglia, Manarola et Riomaggiore,
dans la Riviera du Levant, sont inscrites au patrimoine mondial par l’Unesco.
De 1999 à 2002 : La statue d’Andrea Doria, détruite à la fin du
XVIIIe siècle au Palazzo Ducale, est reconstruite par le sculpteur
Lorenzo Garaventa.
2001 : En juillet, réception à Gênes du G8, durant laquelle un
jeune opposant au capitalisme, Carlo Giuliani, trouve la mort dans
une manifestation. La même année, Renzo Piano construit la
Biosfera, une serre futuriste. Par ailleurs, la fontaine de la
Piazza De Ferrari est restaurée.
2003 : Participation massive de Gênes aux manifestations contre la
guerre en Irak.
2004 : Gênes est capitale européenne de la culture. A cette
occasion, le Galata-museo del mare est inauguré. C’est le plus
grand musée de la mer en Europe. Par ailleurs, la Galeria d’arte
moderna de Nervi est réouverte après une phase de travaux.
2006
: Le 13 juillet 2006, les Strade Nuove et la liste des Rolli,
soit quarante-deux palais, sont classés au patrimoine mondial par l’Unesco.
Une vaste campagne de restauration est alors lancée.
L’Italie traverse alors une période
difficile, dont les échos se
font sentir sur la côte ligure. Le
pays a est affecté par la récession à partir de la fin
de
2011, alors que la dette publique atteint 120 % du PIB et que le
chômage demeure à un niveau élevé, sur fond de politique
d’austérité reflétant les exigences de Bruxelles en matière de
rigueur budgétaire. Les choses se sont toutefois améliorées à
partir de 2013, qui a vu un modeste retour de la croissance résultant
de la bonne santé des services, de l’industrie et des
exportations, mais avec le maintien de fortes inégalités régionales
si l’on considère l’ensemble du pays. La région milanaise
demeure la région capitale en matière économique mais celles de
Turin et de
Gênes sont celles où le niveau de vie est le plus élevé du pays.
Elles profitent notamment du dynamisme du tourisme qui a fait de
l’Italie la cinquième destination mondiale et de la bonne santé
de ses petites et moyennes entreprises.
2014 : Le gouvernement de
centre-gauche de Matteo Renzi, appuyé sur le Parti Démocrate et sur
le centre-droit, engage la mise en œuvre
d’un vaste plan de réformes dont une refonte du code du travail.
Les résultats se révèlent encourageants alors que le pays
avait vu sa production baisser de 0,3 % en 2012 et de 1,9 % en 2013 –
ce qui entraînait un retour à son niveau de production de 2000, une
augmentation du chômage et une baisse des investissements. La
croissance est de 0,8 % en 2015 puis de 1,6 % en 2016, ce qui conduit le président du Conseil Matteo Renzi – arrivé aux
affaires en 2014 – à affirmer que « l’Italie
n’est plus un problème ». Le retour de la croissance, après
treize trimestres de récession, le retour du pays, dans de bonnes
conditions, sur le marché de la dette souveraine, les progrès de la
consommation intérieure, du commerce extérieur et de la production
industrielle encouragent à l’optimisme le ministre de
l’économie Pier Carlo Padoan. Mais le chômage reste élevé,
malgré la réforme finalement mise en œuvre
du marché du travail, et il faut poursuivre les privatisations
pour réduire la dette publique.
2015 : Le succès rencontré par
l’exposition universelle de Milan, qui a accueilli 20 millions
de visiteurs, profite plus largement à toute l’Italie du nord.
Ces résultats encourageants incitent Matteo Renzi à avancer sur
la question de la réforme constitutionnelle avec, à la clé, un
référendum prévu pour décembre 2016.
Décembre 2016 : Après quinze années difficiles, les électeurs expriment leur mécontentement lors du référendum de réforme constitutionnelle : ils votent « non » à 59% (+ de 70% chez les moins de 35 ans). Ce résultat conduit à la démission de Matteo Renzi qui avait la confiance des institutions européennes, remplacé par Paolo Gentiloni. Malgré la réforme du marché du travail, le chômage persiste à un haut niveau. Dans le même temps, le rejet de la classe politique et le développement de sentiments anti-bruxellois favorisent la montée dans l’opinion du mouvement populiste 5 Etoiles de Beppe Grillo. La question de l’immigration en provenance des côtes africaines devient également un élément majeur du débat politique.
2017 : La conquête de la mairie de Gênes par la droite
prélude aux développements à venir, dans un paysage
idéologique de plus en plus marqué par la question de
l’immigration, alors qu’en décembre 2017 un vote du Sénat a
écarté l’introduction du droit du sol. Au moment où c’est
l’Italie du sud qui se retrouve en première ligne face à ce
problème, les échos qu’il entraîne au nord n’en apparaissent
pas moins comme un élément majeur des recompositions politiques et
électorales au delà des Alpes.
Mars 2018 : Les élections législatives sont perçues comme un séisme politique de grande ampleur. Avec 37% des voix, la coalition des droites réunissant Forza Italia, Fratelli d’Italia et la Ligue de Matteo Salvini l’emporte, la Ligue en constituant désormais l’élément le plus fort. A l’inverse le Parti Démocrate de Matteo Renzi, aux affaires depuis 2013, subit une déroute historique avec 18% des voix. Le Mouvement 5 Etoiles de Luigi di Maio atteint pour sa part 32% des voix. Contre toute attente, c’est un gouvernement de coalition confié à Giuseppe Conte réunissant le mouvement 5 Etoiles et la Ligue qui se met en place à l’issue de cette séquence électorale. Très vite, c’est le leader de la Ligue - Matteo Salvini, devenu ministre de l’Intérieur - qui s’impose comme la personnalité la plus en vue du gouvernement, en exploitant auprès de l’opinion la crise migratoire.
Août 2019 : Alors que la Ligue l’a emporté lors des élections européennes avec 35% des voix (le Mouvement 5 Etoiles est tombé à 17%) Matteo Salvini déclenche une crise gouvernementale dont il attend de nouvelles élections qu’il espère remporter. Contre toute attente, le Mouvement 5 Etoiles trouve une alternative dans une alliance avec le Parti Démocrate qu’il dénonçait violemment quelques années plus tôt. Le gouvernement Conte 2 va bénéficier du soutien de Bruxelles, garanti par la bénédiction inattendue que lui donne Matteo Renzi.
2020 : Le débat politique est éclipsé en 2020 par l’épidémie de Covid qui frappe durement l’Italie, premier pays d’Europe contraint d’imposer le confinement. Pour l’Italie cela signifie la chute du PIB et l’envolée de la dette publique alors que l’Europe doit accepter la suspension du pacte de stabilité imposé en amont pour permettre le retour à l’équilibre financier. Sur le plan politique, un nouveau rapport de forces se dessine à droite à l’occasion de diverses élections locales. Forza Italia poursuit son déclin mais la Ligue de Matteo Salvini doit maintenant compter avec le mouvement Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni.
Février 2021: Une majorité inattendue se forme au Parlement pour soutenir le gouvernement confié à Mario Draghi, l’ancien président de la Banque Centrale Européenne, naguère ennemi juré de la Ligue et du Mouvement 5 Etoiles. Une volte-face qui s’explique par l’ampleur de l’épidémie de Covid et par le fait que le plan de relance européen a été orienté en priorité vers l’Italie, appelée à recevoir 200 milliards d’euros. Le mouvement 5 Etoiles perd en octobre 2021 les mairies de Rome et de Turin. La Ligue se rallie à la majorité de Mario Draghi mais son audience mesurée par les enquêtes d’opinion continue à s’éroder au profit du mouvement concurrent Fratelli d’Italia. Dans le même temps, le Parti Démocrate opère une sensible remontée. Mais le vainqueur du moment est sans conteste Mario Draghi, soutenu par la classe dirigeante, par les marchés et par l’Europe.
Au moment où l’économie repart (5,8% de croissance en 2021 et 4,2% attendus en 2022, de quoi compenser la récession de 8,9% entraînée en 2020 par la pandémie), le maintien d’une forte activité industrielle et d’une balance commerciale bénéficiaire demeurent de sérieux atouts. L’incertitude politique demeure toutefois dans la perspective des élections législatives prévues en septembre 2022. La coalition des droites au sein de laquelle domine désormais le parti de Giorgia Meloni, Fratelli d’Italia, est donnée gagnante par les sondages, ce qui ouvrirait une ère nouvelle dans l’histoire politique compliquée de l’Italie.